Malgré les célébrations, mardi prochain, de l’anniversaire du décès de Rabbi
Chimon bar Yo’haï, il importe de nous rappeler que celui-ci avait pour
maître rabbi Akiva qui, un siècle environ après la destruction du second
Temple, sacrifia sa vie pour assurer la pérennité du peuple juif dans l’exil…

« Zo Torah véZé Skhara ?! »

C’est à la page 61/b du Traité talmudique
Berakhot qu’il est relaté
comment rabbi Akiva fut arrêté
et exécuté par les Romains qui le
torturèrent en lui arrachant la
peau à l’aide de peignes d’acier…
Surmontant l’atrocité de ses douleurs,
le Tana récita avec une
concentration extrême le « keriat
Chéma » en insistant tout particulièrement
sur le mot « E’had »
afin que son âme sorte de son
corps pendant qu’il le prononcerait
!

Or avant qu’il ne rende son dernier
souffle, ses élèves – qui
avaient assisté impuissants à ses
terribles souffrances – lui demandèrent
: « Jusqu’à ce point là…? ».
Le maître eut encore la force de
leur répondre : « Toute ma vie
durant, je ne pouvais supporter
l’idée que, peut-être, je n’accomplirai
pas le commandement qui
ordonne de servir D.ieu de toute
son âme, au point de se sacrifier…
Alors qu’aujourd’hui il m’est donné
l’occasion de le réaliser, pourrais-
je ne pas l’accomplir ? ».

Et comme l’explique le Rama mi-
Fano (Assara Maamarot, ‘Hakor
Din, 2, 9), la fin tragique de rabbi
Akiva fut édictée en vertu précisément
de cette recherche – qui
lui tenait tant à coeur – de l’unité
divine. En effet, comme cela ressort
d’un autre passage du Talmud
(Traité Ména’hot, page 29/b), ce
maître de la Torah orale exprima
le souhait, toute sa vie durant, de
pouvoir expliquer la totalité de
la Torah écrite, et ce, jusqu’aux
fameuses « couronnes » qui surmontent
les lettres du Séfer Torah.
D’où l’exclamation interrogative
devenue célèbre : « Zo
Torah véZé Skhara ?! [Telle est la
Torah et son salaire ?!] ».

Cette recherche inconditionnelle
de l’unité du « sensé » -de l’identité
entre le réel et la révélation
sinaïtique qui était la sienne –
l’aurait conduit, selon le Rama
miFano, à éprouver cette coexistence
du physique et du métaphysique
au coeur même de sa propre
chair en cet instant ultime…


« Mon fils bien aimé,
Ephraïm »…

Dans les Séli’hot – les demandes
de « pardon » figurant au sein de
la prière de Moussaf de Yom Kippour
-, nous récitons un texte intitulé
« Elé Ezkéra véNafchi Alaï
Echpékha [Quand je me souviens
d’eux, mon âme s’épanche vers
moi] ». Ce Piyout écrit par Yéhouda
‘Hazak décrit la terrible mort
qu’endurèrent les dix Sages victimes
de l’oppression romaine, les
fameux « Assara Harougué Malkhout
». Et nos Sages nous dévoilent
que la mort de ces « dix victimes
de l’empire » fut décrétée en compensation
de la vente de Yossef
par ses dix frères (Midrach Chmouel).
Celle-ci avait en effet non
seulement précipité la descendance
de Yaacov Avinou en Égypte,
mais elle allait en outre devenir le
fondement même de l’exil de l’ensemble
du peuple d’Israël ! Car,
comme l’enseigne un autre Midrach,
enterrée dans l’exil – « sur
le chemin d’Efrat », (Béréchit, 35,
19) -, « Ra’hel pleure son fils, Israël,
appelé au nom de Ra’hel. Non
pas au nom de Ra’hel, mais de
son fils, comme il est dit ‘Mon fils
bien aimé, Ephraïm’, (Jérémie, 31,
19) [c’est-à-dire le fils de Yossef-
Ndlr] », (Béréchit Raba 71, 2).

Figure emblématique de l’unité
d’Israël au coeur même de l’exil,
si Ra’hel Iménou prie pour la
rédemption de son petit-fils
Ephraïm dénommé Israël, c’est
bien parce que la situation du
peuple juif dans l’exil porte le
nom de la descendance de Yossef,
ainsi que le prophète le rappelle
quand il s’exclame : « Haïssez le
mal, aimez le bien ! (…) Et peutêtre
alors D.ieu Tsévakot prendrat-
Il en pitié les débris [Chéérit] de
Yossef ! », (Amos, 5, 15).
Or, comme cela est indiqué dans
le Traité talmudique Yoma (page
9/b), le second Temple fut précisément
détruit en raison de la
haine gratuite (la jalousie et les
rivalités de toutes sortes) qui sévissait
alors entre les membres
du peuple d’Israël.

Tant et si bien que les dix Sages
qui moururent en kidouch
Hachem (sanctification du Nom
de D.ieu) sont dénommés dans
le Talmud « Rabbi Akiva et ses
compagnons » (Traité Sanhédrin,
page 10/b)… Car à l’instar
du maître de la Torah dans l’exil,
leur martyre avait pour but d’as-surer l’unité et la pérennité de
notre peuple pendant les autres
épreuves qui l’attendraient au fil
des siècles.

Alors, en ce jour de « Lag baOmer »,
n’oublions surtout pas au coeur de
nos réjouissances que le dernier
empire de l’exil d’Israël ne prendra
fin que lorsque s’effondrera le
mensonge faisant obstacle à l’unité
réelle du peuple juif, comme il
est dit : « Que ma langue se colle
à mon palais (…) si je ne place Jérusalem
au sommet de toutes mes
joies ! » (Psaumes 137, 6)…

Yehuda Rück


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