Le mémorial de la Shoah a révisé quelque peu ses positions vis-à-vis du pape Pie XII, évitant ainsi un incident diplomatique avec le Vatican.
Jusqu'à présent, le panneau du musée portant sur les activités du Vatican et de Pie XII pendant la Seconde Guerre mondiale indiquait que le pape n’avait pas condamné le massacre des Juifs. Désormais, il sera également souligné que Pie XII a participé au sauvetage d’un certain nombre de Juifs.
La direction de Yad Vashem a tenu à souligner que ce changement avait été décidé de façon totalement indépendante et ne résultait pas de démarches entreprises par le Vatican.
Le texte original date de 2005. Deux ans plus tard, l’ambassadeur du Vatican en Israël, l’archevêque Antonio Franco, avait refusé de participer aux commémorations de la Shoah en raison de son contenu.
A Yad Vashem, on a alors envisagé de le modifier mais la direction du Mémorial a demandé pour cela que le Vatican permette à des enquêteurs de consulter ses archives datant de la Seconde Guerre mondiale. Cette requête a été repoussée. Malgré cela, le mémorial a procédé à quelques petits changements.
La première plaque indiquait : « La réaction de Pie XII au meurtre des Juifs pendant la Shoah est sujet à controverse … Après sa nomination en 1939, la lettre contre le racisme et l’antisémitisme préparée par son prédécesseur a été subtilisée. Lorsque les premières informations sur le massacre des Juifs sont parvenues au Vatican, le pape n’a fait entendre aucune protestation et n’a rien écrit à ce sujet ».
Il est écrit également : « En décembre 1942, il ne s’est pas joint à la condamnation des Alliés contre l’extermination des Juifs. Et lorsque des Juifs de Rome ont été envoyés à Auschwitz, le pape n’a pas réagi. Le pape a maintenu sa neutralité, mis à part quelques interventions en marge de la guerre auprès des autorités hongroises et slovaques. Son silence et le fait qu’il n’a donné aucune directive ont contraint des hommes d’Eglise dans toute l’Europe à décider par eux-mêmes de la façon dont ils devaient se comporter face aux persécutions juives ».
Dans la nouvelle plaque, le titre a été changé par « le Vatican et la Shoah ». Le texte parle tout d’abord du prédécesseur de Pie XII, Pie XI. Il est précisé là aussi que Pie XII s’est abstenu de signer la déclaration des Alliés de 42 mais il est indiqué qu’il a parlé un peu plus tard, dans un discours radiophonique, « des centaines de milliers de personnes qui étaient condamnées à mort ou à une lente répression alors qu’elles n’avaient commis aucune faute ». « Toutefois, lui reproche-t-on, le pape n’a pas mentionné explicitement les Juifs et n’est pas intervenu au moment de la déportation des Juifs de Rome vers Auschwitz ».
Autre changement : Yad Vashem a ajouté les mots « échec moral » dans le nouveau texte : « Ceux qui critiquent le pape affirment que sa décision de ne pas condamner le meurtre des Juifs par l’Allemagne nazie constitue un échec moral. En ne donnant aucune directive claire, il a permis à un grand nombre de personnes de collaborer avec l’Allemagne nazie sans que cet acte soit considéré comme contraire aux principes et aux valeurs de l’Eglise catholique ».
Le texte poursuit : « Ses partisans prétendent en revanche que sa neutralité a évité que des mesures plus sévères soient prises contre le Vatican et contre les institutions catholiques à travers l’Europe et a permis à l’Eglise, à différents échelons, d’entreprendre un certain nombre d’actions secrètes de sauvetage. En outre, ils mettent en exergue certains cas où le pape a approuvé les opérations de secours en faveur des Juifs ».
Le dossier ne semble pas clos pour autant. La direction du mémorial indique que « tant que tous les documents ne seront pas disponibles, la question continuera à être examinée et révisée ». Affaire à suivre, donc …
