
Il appela Moché. (1, 1)
La lettre alef du mot wayiqra (« Il appela ») est de taille réduite. Selon Rabbi Ya?aqov ben Acher, le Ba?al ha-Tourim, cette particularité s’explique par le fait que Moché, dans sa profonde humilité, aurait voulu qu’il soit écrit wayiqar (« Il survint ») ? dérivé du terme miqré ? ce qui aurait suggéré que Hachem lui était apparu fortuitement, dans un rêve. Ce verbe est celui employé au sujet de la prophétie recueillie par Bil?am (Bamidbar 23, 4) : « Dieu survint (wayiqar) à Bil?am? »
Le Saint béni soit-Il lui ayant alors enjoint d’ajouter un alef, Moché, le plus humble des hommes, Lui a demandé l’autorisation de faire paraître cette lettre plus petite que les autres, et l’a ainsi calligraphiée.
Il appela Moché. (1, 1)
Le nom alef renferme également une connotation d’étude, fait remarquer le Kelé Yaqar, citant le verset de Iyov (33, 33) : « et je t’enseignerai (waalèfekha) la sagesse ».
Ainsi, celle qui clôt le terme wayiqra est plus petite que les autres pour signifier allusivement que le fruit de l’étude se maintient chez celui qui « se fait petit » et humble. Et la Tora de préciser : « Il appela Moché » : Moché a mérité que Hachem l’appelle et lui parle, précisément parce qu’il s’était « fait petit » et effacé en affirmant (Chemoth 4, 10) : « Je ne suis pas un homme de paroles? »
Il appela Moché. (1, 1)
La Tora atteste sur Moché qu’il était « très humble, plus que tout homme qui fût sur la face de la terre » (Bamidbar 12, 3), ce qui signifie, à première vue, qu’il avait atteint le degré de perfection dans le domaine de la modestie.
Néanmoins, du fait que « le souffle de vie » ? l’âme ? a été introduit dans l’être humain par le Créateur comme une part de Son essence, il n’est aucune limite à la progression pouvant être accomplie par l’homme dans l’acquisition de chaque trait positif. Voilà pourquoi même pour Moché, qui détenait plus de modestie « que tout homme qui fût sur terre », il restait possible de développer et de raffiner cette qualité.
Cette idée apparaît allusivement dans le premier mot de ce ?houmach : le petit alef de wayiqra nous montre allusivement que Moché a profité de l’occasion de cet appel divin pour s’élever davantage dans l’humilité et pour parfaire cette vertu.
Rav ?Hayim Vital rapporte l’enseignement de Zohar (II 58a) selon lequel, lorsque les enfants d’Israël ont commis le péché du veau d’or, Moché « a été privé de mille (elèf) doses de l’éclat de sa face ».
Le petit alef du mot wayiqra est une allusion à cette réduction de élef.
Il appela Moché. (1, 1 )
Enseignement du Midrach (Wayiqra Rabba 1, 15) : « Si un érudit de la Tora est dénué de bon sens, même un cadavre vaut mieux que lui. Sache qu’il en va réellement ainsi, et apprends-le de Moché, notre Maître, père de la sagesse et de la prophétie. [?] Lui qui rapporta des cieux les Tables de la loi, et qui s’affaira à la construction du Tabernacle, il n’y entra pas avant d’y être invité, comme il est écrit : ?Il appela Moché?? »
Ce que nous apprenons ici, explique Rav Aharon Kotler, ce n’est pas seulement que le savoir-vivre précède l’acquisition de la Tora, mais que si le comportement d’un homme est défectueux et malséant, c’est toute sa Tora qui se retrouve sans valeur. Elle est réduite à néant, dénuée d’importance, au point que même l’âme primaire de l’homme, qui l’animait et lui conférait la qualité de « vivant », ne trouve plus son expression.
C’est ainsi qu’un « cadavre » vaut mieux qu’un tel homme. Et c’est pourquoi les Sages du Midrach ont affirmé : « Apprends cela de Moché, notre Maître, père de la sagesse et des prophètes ». Plus haut est le niveau d’un homme ? comme Moché, qui fut le parangon de la sagesse et de la prophétie ? plus il est exposé à l’erreur, fût-elle ténue. Et lorsqu’une telle atteinte endommage son niveau de sagesse, il risque de déchoir jusqu’à se retrouver comme une dépouille !

