« Car tu as lutté contre des puissances célestes et humaines et tu les as vaincues » (Béréchit 32,29)
Comment la Tora peut-elle affirmer que Ya’aqov vainquit l’ange alors qu’en fin de compte, « la cuisse de Ya’aqov se luxa tandis qu’il luttait avec lui », lui causant une claudication ? Etait-ce réellement là une « victoire » ?
Le Maguid de Minsk répond à cette remarque par une idée remarquable
Lorsque deux personnes s’affrontent, le résultat de leur combat dépend uniquement de la teneur du conflit. S’il s’agit d’un combat physique, c’est lorsque l’un des adversaires assène un coup fatal au second qu’on peut le déclarer vainqueur.
En revanche, si le conflit consiste en une joute verbale portant sur l’aspect théorique d’un problème, chacun essaiera de vaincre son opposant par des démonstrations ou des preuves rationnelles. Dans ce contexte, la victoire ne saurait être attribuée qu’à celui qui parvient à avancer des arguments justes et fondés, reconnus comme tels par l’autre partie.
Or, si dans un tel affrontement, l’un des adversaires venait à « répondre » à son antagoniste en le martelant de coups et blessures, tout jury s’accorderait à déclarer l’agresseur vaincu : le simple fait qu’il ait eu recours à la force physique est une preuve avérée de sa défaite intellectuelle.
C’est exactement ce qui se déroula entre Ya’aqov et l’ange de ‘Essav. Leur confrontation n’avait en réalité rien de physique, puisqu’elle était au contraire entièrement orientée vers la pensée et l’idéologie : c’était deux puissances spirituelles qui s’affrontaient dans un combat où l’enjeu était uniquement d’ordre moral. Par conséquent, si l’ange décida de mettre un terme à ce combat en agressant Ya’aqov physiquement, c’est nécessairement parce qu’il se vit vaincu. La blessure de Ya’aqov fut donc bien la preuve qu’il sortit lui seul vainqueur de ce conflit.
Extrait du Lekah Tov, Béréchit Tome 2, disponible en librairie