Encore aujourd'hui, Thérèse Andrieux, habitant Périgueux, parle de son « petit Marcel ». À l'époque, il avait 14 ans et était juif. Elle n'avait qu'une petite année de plus et elle l'a accueilli avec sa mère sous son toit de 1939 à 1945.
Thérèse Andrieux fait partie de la vingtaine de famille périgourdine qui ont été honorées hier lors de la cérémonie place du général Leclerc, pour avoir sauvé des juifs pendant la seconde guerre mondiale. Cet hommage s'inscrivait dans le cadre de la journée nationale à la mémoire des victimes de crimes racistes antisémites de l'Etat Français et d'hommage aux Justes.
C'était l'occasion pour Thérèse Andrieux de se souvenir des années de son adolescence si particulière. Malgré le temps passé, le souvenir reste très fort. « Ma mère, Gabrielle Roche, avait accepté de loger cette famille d'Alsaciens avec un enfant. Quand ils sont arrivés, ils ont dit qu'ils étaient juifs. « Et alors ? » leur a répondu ma mère qui les a cachés jusqu'à la fin de la guerre. » Gabrielle Roche décide que les parents de la famille Simler logeront dans une ferme de la famille à Eyliac.
« Une fierté pour ma mère »
Elle garde le jeune Marcel auprès d'elle et de sa fille, dans leur maison du cours Fénelon. « Il a poursuivi sa scolarité. Il allait au lycée Bertrand de Born. C'est là qu'il a passé avec succès son baccalauréat en 1945 », se remémore Thérèse Andrieux. Son « petit Marcel », revenu en Alsace à la Libération, s'inscrit alors à la faculté de médecine et réussit avec brio ses études. « Quand il est devenu médecin, c'était une grande fierté pour ma mère qui avait fait en sorte qu'il n'interrompe pas sa scolarité ».
La dame, désormais d'un certain âge, se souvient de ce climat de méfiance généralisé. « Je n'ai jamais dit à quiconque que nous hébergions des Juifs. Même à ma meilleure amie. Je ne lui en ai parlé qu'une fois la guerre finie. » La famille Simler doit aussi son salut au courage et aux bons réflexes de la maman de Thérèse. « En 1942, ma mère a refusé de signaler comme la loi le demandait qu'elle hébergeait des Juifs. Ainsi, sur leurs coupons d'alimentation, Marcel et ses parents n'ont jamais eu le tampon « Juif ». Reste la vigilance de tous les instants. La Périgourdine, qui à l'époque servait d'agent de liaison pour son frère passé dans le maquis, se souvient encore du bruit des tractions passant le soir, cours Fénelon. « On avait peur qu'il s'agisse de miliciens ou d'Allemands venant chez nous. On envoyait alors Marcel dans le grenier, et je prenais sa place dans le lit pour ne pas éveiller les soupçons ».
Toute sa vie, Thérèse Andrieux a gardé contact avec lui. Au point qu'aujourd'hui, quand elle parle des enfants de ce Juif qu'elle a connu adolescent, on la sent aussi émue que quand elle évoque ses propres enfants et petits enfants. Et comme sa mère avant elle, il y a de la fierté dans sa voix, quand elle évoque le fils de Marcel qui, à son tour, est devenu médecin.
Par Marie Gasc [source : sudouest.fr]