Après 20 ans de mariage et toujours pas d’enfant, Itzhak et Rivka prient Hashem de tout leur cœur. Hashem les exauce, et Rivka accouche de deux jumeaux bien différents… L’un nait avec un corps développé, poilu comme un adulte. Selon le Targoum Yontahan, même sa dentition est complète ! Aussi, ses parents l’appelle Essav, au nom de עָשׂוּי [Assouï] – celui qui est fait / fini. Le second sort ensuite en saisissant le talon de son frère, telle une personne qui refuse de se faire doubler et tire son concurrent en arrière ; d’où son nom Yaacov, au nom du עקב [Ekev] – le talon.
Ces jumeaux vivent la même enfance, dans la maison d’Itzhak et Rivka. Jour après jour, ces merveilleux parents se donnent corps et âme pour éduquer ces enfants tant espérés. Sans aucun doute, ils leur apprennent à dire Modé Ani dès qu’ils ouvrent les yeux, à se laver les mains immédiatement. Puis comme dans toute maison juive authentique, Rivka les habille en leur mettant le Tsitsit, leur coiffant les Péot bouclées. Itzhak leur apprend à prier Sha’harit, la prière instaurée par Avraham, et leur enseigne les précieux préceptes reçus de son père.
Et un jour, ces deux deviennent adolescents, et un fossé commence à se creuser entre eux. Yaacov s’investit de plus en plus dans l’étude. Il va chez Shem et Ever –les fils et petit-fils de Noah– pour apprendre davantage de ces rescapés/survivants des générations antérieures. Tandis qu’Essav opte pour la vie paisible, et devient un אִישׁ יֹדֵעַ צַיִד, אִישׁ שָׂדֶה – un habile chasseur, un homme des champs, qu’Ounkelos interprète plutôt par גְבַר נַחְשִׁירְכָן – un homme qui aime l’oisiveté.
Lorsqu’ils atteignent l’âge de 15 ans, leur grand-père Avraham décède. Yaacov prépare un plat de lentilles rouges pour servir son père Itz'hak endeuillé. Essav entre alors à la maison après une journée épuisante. Selon le Midrash, il vient de violer une jeune femme et de tuer son mari. A peine Essav renifle-t-il le plat qui mijote qu’il supplie son frère de lui verser dans son gosier ce plat rouge si tentant.
Yaacov lui demande en échange de lui céder le droit d’aînesse, de devenir officiellement celui qui perpétuera l’enseignement d’Avraham et d’Itzhak. Essav évalue rapidement le rendement: « De toute façon, je vais bien mourir un jour; A quoi bon tenir à ce droit d’aînesse?! » Il troque alors son titre contraignant contre de la valeur sûre – un bon petit plat ‘Adom’ – rouge.
Dès lors, la Torah dénommera Essav par Edom. Que signifie exactement ce surnom ? Pourquoi ne pas avoir préféré le nom de Adash – lentille, ou tout autre surnom mélodieux que l’on pourrait attribuer à un glouton ?
Le Sforno **[25:30] interprète: ‘Du fait qu’Essav se montra tellement accro de ses pulsions instinctives, sans même s’être intéressé à la composition de ce plat Adom – rouge, on l’appela Edom – à l’impératif, dans le sens ‘Rougis ! Aies honte de toi, que tu désires tellement te goinfrer de rouge!’ Le nom Edom évoque le fait qu’Essav est avide d’assouvir ses instincts au point de tout brader pour combler un désir même indéfini, une folle envie de bâfrer sans même savoir de quoi il s’agit !
Et ce nom le poursuit jusqu’au bout. Essav a des enfants, des petits-enfants, mais il continue d’être Edom – un animal mû par un instinct avide. La Parasha raconte à 2 reprises des anecdotes assez amusantes du singe qui imite l’homme, et ne fait qu’aggraver sa situation.
A commencer par son mariage à l’âge de 40 ans – afin de perpétuer la coutume de son père Itzhak, qui se maria lui-aussi à 40 ans **[28:34]. Mais combien de femmes viola-t-il jusque-là ? N’aurait-il pas mieux fait de se marier plus jeune, afin d’estomper un tant soit peu son instinct ?! Sans parler non plus de la grande pieuse qu’il épousa… Deux femmes Hitites, idolâtres de pure souche !
Puis à la fin de la Parasha, Itzhak envoie Yaacov à 'Haran pour trouver une fille de bonne famille. Essav dans sa grande sagesse décide lui-aussi d’aller choisir une bonne ‘fille d’chez nous’ –la fille de Yishmaël– mais ne se sépare pas pour autant de ses deux premières idolâtres !
Par Rav Harry Dahan de 5Minutes éternelles