Tous les instants de la vie d'un Juif sont scandés par le nombre «sept»:La fête de Pessa‘h dure sept jours, et elle sera suivie, six mois plus tard, par celle de Soukoth , célébrée également pendant sept jours.
Le mariage est célébré sous les auspices des Chéva' berakhoth («sept bénédictions»), et les festivités qui suivent sa célébration durent encore sept jours.
Il en est de même de la période de deuil pour un être cher ( chiv‘a ), elle aussi d'une durée de sept jours.
Les périodes d'impureté conjugale sont également rythmées par le nombre «sept».
C'est enfin durant sept jours qu'a été préparée l'inauguration du Tabernacle ( Wayiqra 8, 33).
Ce nombre «sept» correspond, selon la mystique juive, à l'ordre naturel, alors que «huit» représente ce qui se situe hors de l'ordre naturel.
La Création a duré sept jours, et elle a constitué la naissance, par les mains de Hachem , des choses de la nature dans lesquelles nous vivons.
Ainsi que l'explique le Maharal , il est dans l'ordre naturel des choses qu'un enfant naisse incirconcis. Aussi la mila doit-elle être pratiquée le huitième jour après la naissance, car elle a pour but de rompre cet ordre naturel et d'élever le nouveau-né jusque dans la sphère de la sainteté ( Nèr mitswa , chapitre23).
L'histoire de l'humanité est placée, elle aussi, sous le signe du nombre «sept». Elle est appelée à durer pendant une «semaine» de sept millénaires. Pendant les six premiers de ces millénaires, les hommes développeront, par leur labeur, l'œuvre divine de la création, et le septième sera «entièrement Chabbath , et repos pour l'éternité» (voir Roch hachana 31a et Ramban ad Berèchith 2,3).
Si l'on considère à présent la fête de Chavou‘oth , on peut constater qu'elle clôt la période du ‘Omer , composée de sept fois sept jours, période dont elle constitue en quelque sorte le cinquantième jour.
Ce cinquantième jour, point de départ d'une huitième semaine, s'il marque le don de la Tora au mont Sinaï, constitue également comme une clôture de la fête de Pessa‘h . Voilà pourquoi cette fête de Chavou‘oth porte souvent le nom de ‘Atséreth («fermeture» – voir par exemple Mena‘hoth 65a). Elle a en effet pour but de nous permettre d'intérioriser en nous-mêmes la démarche qui nous a libérés des «quarante-neuf portes d'impureté» dans lesquelles nous avons été plongés pendant notre esclavage en Egypte.
On peut par conséquent effectuer un rapprochement entre les deux «couples» que sont Pessa‘h et Chavou‘oth , d'une part, et Soukoth et Chemini ‘atséreth , de l'autre. Les deux membres de chacun de ces couples sont en effet éloignés l'un de l'autre par un «sept».
Mais pourquoi Pessa‘h et Chavou‘oth sont-ils séparés par sept semaines, alors que Chemini‘Atséreth fait immédiatement suite à Soukoth ?
C'est une faveur que nous a accordée Hachem , explique le Midrach ( Midrach rabba Chir ha-chirim 7,2):
Il est écrit dans Chir ha-chirim : «Que tes pas sont beaux dans tes chaussures ( ba-ne‘alim ), fille de prince [lorsque tu montes en pèlerinage vers Jérusalem]».
Le Midrach , jouant sur le mot ne‘alim qui peut signifier tout autant «fermetures» que «chaussures», nous apprend:
Rabbi ‘Hananya fils de rabbi Ibi a enseigné:
Il existe deux «fermetures», celle de Pessa‘h et celle de Soukoth . Voici ce qu'a voulu dire à Israël le Saint béni soit-Il: Vous fermez devant Moi à Soukoth , et Je ferme devant vous à Pessa‘h . En fermant devant Moi à Soukoth , vous Me faites ouvrir le ciel, souffler le vent, s'élever les nuages, faire tomber la pluie et faire briller le soleil. Ainsi les cultures pousseront et produiront leurs fruits, et chacun aura de quoi pourvoir à ses besoins.
Quand Je ferme le ciel [devant vous] à Pessa‘h , vous pouvez aller récolter les produits de vos champs et jouir des bénédictions que Je vous y octroie.
Rabbi Yehochou‘a ben Léwi a enseigné:
Le huitième jour de Soukoth aurait dû se situer cinquante jours après cette fête, tout comme Chavou‘oth a lieu cinquante jours après Pessa‘h . Mais étant donné que la fête de Soukoth se situe à l'automne, cela n'aurait pas permis de voyager confortablement.
Cela ressemble à un roi qui avait plusieurs filles, toutes mariées. Les unes habitaient tout près de chez lui, les autres très loin.
Un jour, ces princesses sont toutes venues rendre visite à leur père. Celui-ci leur a dit: Celles d'entre vous qui habitent non loin de mon palais peuvent venir en toutes saisons, ce qui n'est pas le cas de celles qui doivent voyager sur de longues distances. Puisque vous êtes toutes venues, nous allons célébrer ensemble une grande fête.
Il en est ainsi pour Chavou‘oth , qui tombe à la veille de l'été. Hachem dit alors: «C'est la bonne saison pour voyager. Revenez dans sept semaines!»
Mais quand vient Chemini ‘atséreth , on approche de l'automne, les chemins sont poudreux et malaisés. Voilà pourquoi il a lieu tout de suite après Soukoth , afin d'épargner aux pèlerins des efforts superflus.
Jacques KOHN zal'