La parachath Tsaw interdit dans deux versets ( Wayiqra 7, 26 et 27) la consommation du sang d’un animal sous peine de kareth (« retranchement »), et cette interdiction est renouvelée dans Wayiqra 17, 11 et Devarim 12, 23 avec l’indication de sa motivation : « ? car le sang c’est l’âme ».
De nombreuses explications ont été proposées à propos de cette interdiction.
Selon Ramban (Nahmanide) sur Wayiqra 17, 11, Hachem a créé les êtres inférieurs comme les animaux pour servir les besoins de l’homme, qui seul reconnaît son Créateur. Il n’a cependant permis tout d’abord que la consommation des plantes, et ce n’est qu’après le Déluge qu’Il a autorisé d’abattre les animaux pour en consommer la chair ( Berèchith 9, 3).
La vie des animaux appartient à l’homme, mais elle est là pour lui procurer le pardon sous la forme de sacrifices. Il faut par conséquent qu’elle soit offerte au Saint béni soit-Il, et leur viande ne peut pas être autrement mangée. Aucune créature ne peut en effet consommer la vie elle-même étant donné que toutes les vies appartiennent à Hachem tout autant que celles des hommes.
« Car telle la destinée des fils de l’homme, telle la destinée des animaux ; leur condition est la même, la mort des uns est comme la mort des autres ; un même souffle les anime : la supériorité de l’homme sur l’animal est nulle, car tout est vanité » (Ecclésiaste 3, 19).
Pour rabbi Avraham Yits’haq ha-cohen Kook, manger de la viande est une chose fondamentalement mauvaise. Toutefois, la Tora n’élimine jamais complètement les instincts de l’homme, mais elle limite ses appétits. C’est ainsi que l’interdiction de consommer du sang et la mitswa qui veut que nous répandions
celui de certains animaux et le couvrions de terre ou de cendres représentent la première étape vers le végétarianisme idéal, tel qu’il existait avant que la terre soit noyée sous les flots du Déluge. Un jour viendra où la consommation de la viande sera complètement abolie, et où une paix perpétuelle règnera entre l’humanité et le reste du monde animal. Alors « le lion, comme le b?uf, se nourrira de paille » (Isaïe 11, 7), et il ne restera alors de tous les sacrifices que celui de min’ha ( « oblation »), composé exclusivement de végétaux, ainsi qu’il est écrit : « Alors la min’ha de Juda et de Jérusalem sera agréable à Hachem , comme aux jours anciens et comme aux années d’autrefois » (Malachie 3, 4).
-o-o-o-o-o-o-o-o
Haftarath Tsaw ? Une alternative aux sacrifices ?
La haftarath Tsaw (Jérémie 7, 21 à 9, 23) commence par les mots : « Ainsi a parlé Hachem – Tsevaqoth , Dieu d’Israël : « Joignez vos holocaustes à vos [autres] sacrifices et mangez de la viande. Car Je n’ai point parlé avec vos pères, et Je ne leur ai rien commandé, le jour que Je les fis sortir du pays d’Egypte, en fait d’holocauste et de sacrifice . »
En d’autres termes, quand Hachem a fait sortir d’Egypte les enfants d’Israël, c’est l’obéissance à Ses mitswoth qu’Il leur a imposée, et non des sacrifices.
Comment se peut-il, se demande Rambam (Maïmonide), que Hachem ait pu faire dire par le prophète qu’Il n’avait rien ordonné aux enfants d’Israël, en fait d’holocauste et de sacrifice, le jour où Il les a fait sortir d’Egypte ?
En fait, répond-il ( Guide des Egarés 3, 32), ce dont il est question dans la parole du prophète est la mitswa que Hachem a ordonné à Mara : « ? Là Il plaça pour lui un statut et une ordonnance, et là Il l’éprouva » ( Chemoth 15, 25). Comme l’explique Rachi , Il leur a donné à Mara à étudier une partie des paragraphes de la Tora , ceux qui concernent le Chabbath , la vache rousse et les tribunaux ( Sanhédrin 56b).
Ces trois mitswoth ne concernaient en rien le culte des sacrifices. Celui-ci est en effet introduit par un autre texte : « Ecoute, Mon peuple, et Je parlerai ; [écoute], Israël, et Je témoignerai au milieu de toi. Moi, Je suis Dieu, ton Dieu. Je ne te reprendrai pas à cause de tes sacrifices ou de tes holocaustes, qui ont été continuellement devant moi. Je ne prendrai pas de taureau de ta maison, ni de boucs de tes parcs » (Psaumes 50, 7 et suivants).
Signalons que la haftara se termine par deux versets, empruntés à un autre chapitre du livre de Jérémie : « Ainsi a parlé Hachem : Que le sage ne se glorifie pas de sa sagesse, et que le héros ne se glorifie pas de sa force ; que le riche ne se glorifie pas de sa richesse. M ais que celui qui se glorifie, se glorifie en ceci : qu’il a de l’intelligence et qu’il Me connaît ; car je suis Hachem , qui exerce bonté, jugement et charité sur terre, car en ces choses-là je trouve mes délices, parole de Hachem . »
Ces versets, dont l’insertion a pour but de permettre à cette haftara de s’achever sur une note moins sévère que celle sur laquelle elle a commencé, nous apprennent aussi que notre obéissance à la parole divine n’a d’autre but que de nous amener à faire régner en ce monde-ci l’amour, la justice et la charité. Car ce sont eux qu’affectionne Hachem .
Jacques KOHN.