Voici quelle sera la loi du ?lépreux? ( torath ha-metsora’ ) au jour de sa purification : il sera présenté au kohen » ( Wayiqra 4, 2). Rabbi Yehochou?a ben Lévi a enseigné : Le mot torath (« loi de ») est employé à cinq reprises dans la Tora à propos du « lépreux ». C’est pour nous apprendre que celui qui profère du lachone hara’ (« propos médisants ») transgresse chacun des cinq livres de la Tora ( Wayiqra rabba 15, 6). Quel est le rapport entre le lachone hara’ et les cinq livres de la Tora ? Dans Berèchith 3, 5, le serpent encourage Eve, en employant du lachone hara’ , à manger le fruit de l’arbre de la connaissance. Il lui déclare : « Tout artisan déteste ceux qui font le même travail que lui. Hachem Dieu a mangé du fruit de l’arbre, puis Il a créé le monde. [Si donc vous en mangez à votre tour, ?vous serez comme Lui?] » ( Rachi ad loc . et Berèchith rabba 19, 4).
Dans Chemoth (4, 6), Hachem demande à Moïse de mettre sa main en son sein, et « voici que sa main était ?lépreuse? comme la neige ». Cela est arrivé, explique Rachi au nom du Midrach tan?houma 23, parce qu’il avait calomnié les enfants d’Israël en suggérant qu’ils pourraient ne pas le croire ( Chemoth 4, 1), raison pour laquelle, explique le Midrach tan?houma , il a été frappé de la « lèpre ». Dans Wayiqra (19, 16), la Tora prohibe explicitement le lachone hara’ en interdisant de « colporter dans nos peuples ». Le livre de Bamidbar nous apprend que Miryam a été frappée par la « lèpre » pour avoir émis du lachone hara’ à l’encontre de son frère Moïse. Et dans Devarim (24, 8 et 9) la Tora nous met en garde contre la plaie de la « lèpre » et rappelle celle qui a frappé Miryam.
Voilà pourquoi, étant donné que le lachone hara’ est mentionné, soit explicitement soit implicitement, dans chacun des livres de la Tora , celui qui en répand est considéré comme les ayant transgressés tous les cinq.
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Haftarath parachath Metsora’ ? Quatre « lépreux »
La haftara attachée à la parachath Metsora’ (II Rois 7, 3 et suivants) raconte un épisode survenu à l’époque du prophète Elisée, tandis que le Royaume du Nord était engagé dans une guerre contre la Syrie, dont les troupes assiégeaient Samarie.
Quatre « lépreux » se trouvaient alors bannis, comme l’exige la Tora ( Wayiqra 13, 46), hors de la ville. Une remarque s’impose d’emblée : Le royaume d’Israël connaissait alors une profonde déchéance religieuse, que le siège de sa capitale ne pouvait qu’accentuer. Cependant, malgré l’impiété généralisée de la population, encouragée et entretenue par ses rois, les lois sur la « lèpre » continuaient d’être respectées avec minutie. Ce respect des halakhoth est d’autant plus remarquable que ces quatre « lépreux » n’étaient autres que Gué?hazi, le serviteur d’Elisée, et ses trois fils ( Sota 47a), et nous savons par ailleurs que Gué?hazi fait partie de ceux qui n’ont pas droit au monde à venir ( Sanhédrin 100a). Le siège de leur ville inquiétait grandement les quatre « lépreux » : S’ils retournaient dans celle-ci, ils y mourraient de faim, et s’ils restaient sur place ils mourraient également. Ils décidèrent donc de chercher asile dans le camp des Syriens, se disant qu’ils y trouveraient peut-être une chance de survie.
Mais arrivés dans le camp ennemi, une surprise totalement inattendue les y attendait : Hachem y avait suscité une terreur panique. Les soldats s’étaient enfuis, abandonnant sur place leurs équipements, leur nourriture et ce qu’ils avaient de plus précieux. Nos quatre hommes, ravis de l’aubaine, entrèrent dans une tente pour y manger et boire, puis ils emportèrent l’argent, l’or et les vêtements ainsi abandonnés.
Après quoi ils annoncèrent la bonne nouvelle aux assiégés, et ceux-ci se précipitèrent à leur tour hors des murs de la ville pour enfin s’alimenter et se désaltérer.
Cet épisode nous apprend que même celui qui a péché ne devient pas nécessairement mauvais : Ce sont les « lépreux », et eux seuls, qui ont permis aux habitants de la ville, en leur annonçant que le siège était levé, d’échapper à la mort.
Jacques KOHN.