C'est dans la parachath Bo qu'est stipulée pour la première fois la mitswa du rachat du premier-né ( pidyone ha-ben ) : « Et tout premier-né de l'homme parmi tes fils, tu le rachèteras » ( Chemoth 13, 13).
La cérémonie qui accompagne l'accomplissement de cette mitswa présente une particularité inattendue.
Les repas qui fêtent la célébration d'un mariage ou l'accomplissement d'une berith mila sont toujours servis après cette célébration et après cet accomplissement. En revanche, c'est pendant le repas de fête, et non avant lui, que l'on procède au pidyone ha-ben .
Joseph a été vendu par ses frères pour vingt pièces d'argent ( Berèchith 37, 28), montant équivalent aux cinq sela'im que verse le père pour le rachat de son fils. C'est pour nous faire pardonner cette vente que la Tora a institué le pidyone ha-ben ( Berèchith rabba 84, 18).
Or, cette vente de Joseph a eu lieu précisément pendant que ses frères s'étaient installés pour prendre un repas : « Ils s'assirent pour manger du pain, ils levèrent les yeux et virent, et voici une caravane d'Ismaélites qui venait de Guil'ad » Berèchith 37, 25).
Rappelons en outre que le 10 nissan , lorsque Hachem a ordonné aux enfants d'Israël de préparer un agneau qui devait être égorgé dans l'après-midi du 14 et être mangé le même soir, Il leur a dit : « Je passerai dans le pays d'Egypte cette nuit-là, je frapperai tout premier-né dans le pays d'Egypte » ( Chemoth 12, 12).
Voilà pourquoi, étant donné que le rachat du premier-né se rattache à deux événements pendant lesquels nos ancêtres étaient installés à un repas, l'usage s'est répandu de célébrer le pidyone ha-ben au milieu d'un festin, et non avant.
(D'après Vedibarta Bam ).
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Haftarath parachath Bo Nabuchodonosor et Pharaon
Le texte de notre haftara s'inscrit dans un contexte historique bien précis: Le Pharaon Nekao traverse la Judée pour se porter à la rencontre de Nabuchodonosor. A Megiddo, il remporte la victoire sur Josias, le roi de Juda, qui essaie de l'arrêter ; puis il poursuit son avance vers le nord. Il affronte finalement Nabuchodonosor à Karkemish, sur l'Euphrate. Là, il est vaincu en l'an 605 avant l'ère commune et la suprématie sur le Moyen-Orient, qu'il a voulu arracher à Nabuchodonosor, reste dans les mains de celui-ci (Cf. II Rois 23, 29).
Mais Nabuchodonosor décide d'exploiter sa victoire et poursuit l'armée du Pharaon jusqu'en Egypte. Et c'est cet épisode de la lutte entre les « deux grands » de cette époque que le prophète Jérémie interprète dans notre texte. Ayant toujours dénoncé toute alliance avec l'Egypte il ne peut que trouver, dans la défaite de ce pays, un appui à sa clairvoyance politique.
Certes, à cette époque-là, le sort d'Israël et celui de l'Egypte paraissent liés ; mais en réalité il n'en est rien. Israël, précise Jérémie, doit poursuivre son chemin seul. Si l'Egypte, elle, subit le châtiment de Hachem , Israël, lui, sera épargné. Et nous retrouvons ainsi un point commun entre la haftara et la sidra où, également, les Hébreux se trouvent épargnés par les plaies qui s'abattent sur leurs oppresseurs (cf. Chemoth 10, 23 ; 11, 7 ; 12, 23).
Mais, bien entendu, c'est dans son ensemble que le texte de la haftara est à rapprocher de celui de la sidra de cette semaine. Dans cette dernière, l'Egypte est, à juste titre, la victime des plaies envoyées par Hachem en vue de la châtier pour son comportement à l'égard des Hébreux. Dans la haftara , l'Egypte subit encore la punition divine ; cette fois-ci c'est Nabuchodonosor qui en est l'exécuteur.
Ajoutons enfin, qu'on peut trouver un parallèle entre le désespoir des Egyptiens se rendant compte qu'ils sont perdus ( Chemoth 10, 7) et la manifestation des Egyptiens contre le Pharaon après leur défaite telle que la rapporte la haftara : « Ils ont crié là : Pharaon, roi d'Egypte, n'est qu'un bruit ; il a laissé passer le temps ! » (46, 17).
L'histoire de l'Egypte et celle d'Israël se côtoient souvent ; mais ces deux nations n'en poursuivent pas moins des voies parallèles qui, par définition, ne doivent pas se rencontrer.
(D'après le rabbin Jean Schwartz, « Les haftarott »)
Jacques KOHN.