Les Palestiniens de She’hem (Naplouse), qui fournissaient en nombre les rangs des leaders et des activistes les plus fervents de la première et de la seconde Intifada, affirment aujourd’hui ne pas vouloir en déclencher une troisième… Reportage.

Le restaurant d’Abou Imad, qui fait face à l’entrée de la mosquée Nasr au cœur de la casbah de She’hem, est une institution bien connue de la ville. Abou Imad, 75 ans, se souvient comment les manifestations partaient de la place juste en face, chaque vendredi, pendant la première Intifada de la fin des années 1980… C’est là aussi que se rencontraient les membres des Brigades des Martyrs d’Al-Aqsa, durant la deuxième Intifada qui a commencé au début de l’automne 2000.
Voilà quelques jours, une réunion a eu lieu dans ce restaurant en présence de plusieurs anciens dirigeants des Brigades Al-Aqsa pour évoquer la situation actuelle, leur amnistie par Israël et ce qu’ils attendent de l’éventuelle demande de reconnaissance d’un État palestinien indépendant par les Nations unies en septembre prochain…
Ce sont bien eux qui ont mené les attaques contre Israël entre 2000 et 2008, mais pourtant, au cours de cet entretien, ils ont répété à maintes reprises qu’ils ne se joindraient pas à une « troisième Intifada » si celle-ci venait à éclater.
S., un père de famille âgé de 40 ans, travaille dans une boutique de la casbah : entre 2002 et 2008, il était recherché par Israël. Son frère est mort en perpétrant un attentat terroriste à Kfar Saba, tuant cinq Israéliens.
M. était l’un des terroristes les plus recherchés des Brigades Al-Aqsa entre 2003 et 2008. L. a pour sa part échappé à l’armée israélienne pendant des années, avant de rejoindre les services de sécurité de l’Autorité palestinienne (AP).
La casbah de She’hem, comme le camp de réfugiés de Balata situé à quelques kilomètres de là, est l’un des symboles palestiniens de l’opposition nationaliste à Israël. Ses tunnels et le fait que les véhicules à moteur ne peuvent y accéder en ont fait un refuge des plus sûrs pour les terroristes les plus recherchés.
« Une semaine avant l’amnistie, je me suis marié ! », raconte S., qui ajoute : « À présent, mon combat essentiel est celui que je mène pour l’avenir de mes enfants. Je veux les élever comme il faut et bien les éduquer. C’est mon but ! »
« La deuxième Intifada nous a ramenés vingt ans en arrière ! »
Juste après l’amnistie, l’AP avait exigé de les laisser en prison, dans des installations sous la surveillance des forces de sécurité palestiniennes, mais plus tard, ils n’y sont restés que la nuit seulement, alors qu’actuellement, ils bénéficient d’une liberté totale. En contrepartie, ils ont dû restituer leurs armes et s’abstenir de toute activité terroriste.
En vertu de cette amnistie, les Services généraux israéliens de sécurité (Shin-Bet) ont octroyé une remise de peine totale ou partielle à près de 400 ex-terroristes.
L. affirme aussi que « l’homme de la rue » n’est pas intéressé par une troisième Intifada : « Nous vivons maintenant à une époque où les gens sont moins intéressés par leur patrie que par leurs salaires ! Les discussions pour savoir s’il y aura ou non une nouvelle Intifada sont inutiles !, ajoute-t-il. La seconde Intifada nous a ramenés vingt ans en arrière avec tous ces morts et le siège de nos villes… Aussi, à mon avis, n’y aura-t-il pas de troisième Intifada. Mais il y aura certainement une réaction en septembre… Les jeunes descendront dans les rues, et tout dépendra de la manière dont les Israéliens réagiront ».
S. abonde dans le même sens : « Par le passé, la situation économique était très difficile. À présent, elle s’est améliorée, mais l’impasse diplomatique pourrait s’avérer problématique. En ce qui me concerne, je ne demande rien d’autre que de pouvoir manger et dormir… Je pense à mes enfants avant tout ! Je ne crois donc pas qu’il y aura une troisième Intifada… » Et d’ajouter que les Palestiniens n’ont vraiment pas beaucoup d’espoir que l’ONU reconnaisse un État palestinien en septembre.

Voir Israël enfin rayé de la carte du Proche-Orient !
Autre indication sur l’état d’esprit actuel des Palestiniens : un sondage d’opinion commandité par Israel Project – une organisation qui fournit des informations sur Israël et le Moyen-Orient – a établi que près de 65 % des Palestiniens estimaient que l’heure était aux pourparlers diplomatiques, tandis que 30 % seulement se prononçaient pour un retour à la confrontation armée. Mais d’un autre côté, seulement 34 % des interrogés se disent en faveur d’une « solution à deux États » avec un État palestinien aux côtés de l’État juif. Et ce, alors que 66 % sont favorables à la solution à deux États, mais uniquement à titre « d’étape préliminaire » en vue d’un État palestinien installé en lieu et place d’Israël…
En d’autres termes, la plupart des Palestiniens ne souhaitent pas d’une nouvelle Intifada en septembre prochain, mais ils ne seraient pas mécontents du tout de voir Israël disparaître de la carte du Proche-Orient…Par Avi Issacharoff,en partenariat avec Hamodia.fr