אֵיזֶהוּ גִבּוֹר, הַכּוֹבֵשׁ אֶת יִצְרוֹ, שֶׁנֶּאֱמַר (משלי טז), טוֹב אֶרֶךְ אַפַּיִם מִגִּבּוֹר וּמשֵׁל בְּרוּחוֹ מִלּכֵד עִיר.
« [Ben Zoma dit : ] ‘ Qui est fort ? Celui qui maîtrise ses propres pulsions naturelles ! Comme il est dit – (Proverbes 16) : " Celui qui résiste à la colère l'emporte sur le héros ; celui qui domine ses passions surpasse le conquérant des villes '' !’ », (Chapitre 4, Michna 1).

Les « pulsions naturelles » dont traite notre Michna, ce sont bien sûr le « mauvais penchant » – yetsère hara – qui est en fait inné chez l’être humain, comme l’explique Rabbi Yossef Karo.
D’après le commentaire de Rabbénou Yona effectué dans son ouvrage sur les Maximes des Pères, Ben Zoma met ici en valeur deux types de personnes : celles qui savent maîtriser leur propre colère pour repousser à plus tard la punition méritée par celui qui a déclenché leur colère, et surtout les gens sont capables de carrément passer outre et de ne pas punir du tout !
Les premières personnes sont comparées par notre Michna à des « héros », notamment lorsque aveuglés par sa colère, elles se retiennent de toutes leurs forces de punir et repoussent le châtiment bien mérité à une date ultérieure. Cette catégorie de gens bénéficient ainsi deux choses : donné plus à froid, leur verdict est plus réfléchi, et il évite toute injustice, comme l’a dit le roi Salomon, « le plus sage des hommes » : « (…) Celui qui se laisse emporter par la colère accumule les fautes ! », (Proverbes, 29, 22).
D’autre part, le maître de Gironde précise que la punition « idéale » doit toujours être administrée « au moment propice », lequel doit chaque fois être choisi avec soin. Repousser à plus tard l’administration d’un châtiment revient à savoir pertinemment maîtriser sa colère… Ce qui nécessite un contrôle quasi « épique » de la clairvoyance de l’esprit sur la passion : une qualité humaine tout à fait sublime qui dépasse de loin l’héroïsme guerrier !
Mais, nous laisse entendre ensuite notre Michna, renoncer totalement à la punition est encore plus difficile, et cela dépend surtout de la « crainte du Ciel » dont la personne qui est censée juger est pourvue… En effet, celui qui est véritablement empreint de « yiraat chamaïm » accepte avec résignation et haute sagesse tout ce qui lui arrive, et – à l’instar de la conduite exemplaire de David -, il n’en veut jamais à personne, On se souvient ainsi que même après avoir été vilipendé et même maudit par Chimi ben Guéra, le roi David s’opposa ensuite à ce qu’il fût châtié : « Le roi répondit : ‘ Qu'ai-je à faire de vous, enfants de Cerouya ? S'il insulte ainsi, c'est que D.ieu lui aura inspiré d'insulter David ; qui lui demandera alors compte de sa conduite ? ’ », (Samuel II, 16, 10).
Ben Zoma nous enseigne donc ici que si remettre à plus tard un châtiment relève de l’héroïsme, ne pas punir relève de la conduite du conquérant victorieux !
Le traité Yoma (page 69/b) du Talmud de Babylone rapporte ainsi que le prophète Daniel s’était étonné que le texte de la prière de la « Amida » (celle des 18 bénédictions dites debout trois fois par jour) cite à son début l’attribut « guibor » – le « Fort » – pour qualifier l’une des conduites de D.ieu, alors que Ses enfants sont exilés parmi les peuples… Or les Sages de la Grande Assemblée ont répondu que c’est justement Son immense indulgence à l’égard des ennemis de Son peuple qui est la preuve la plus flagrante de Sa force.
C’est donc le Maître de l’Univers qui nous donne, une fois encore, « l’exemple » de la conduite idéale : Sa retenue est la manifestation même de Sa puissance ! En partenariat avec Hamodia.fr