Raphael Luzon, le président de la Diaspora juive de Libye aux Etats-Unis est très inquiet de la situation. Pour lui elle est bien pire que celle montrée à la télé ou annoncée à la radio. Les témoignages directs qu’il a pu recueillir auprès de connaissances sur place laissent craindre le pire.
Dans les années 1930 il y avait quelques 25 000 juifs en Libye. Mais leur nombre s’est fortement réduit suite aux persécutions perpétrées par l’Italie et l’Allemagne durant la Seconde Guerre Mondiale. Après la proclamation d’indépendance de la Libye faite en 1951, des pogroms ont encore atteint la communauté. Le dernier juif est parti il y a quelques années pour l’Italie.
Toutefois, Raphael Luzon rapporte que le régime de Gaddafi était en train de s’ouvrir à quelques revendications de la communauté juive libyenne en diaspora. Il a lui même rencontré deux fois le dictateur et la dernière visite remonte à septembre dernier. Luzon rapporte que Gaddafi avait donné son accord pour donner une sépulture décente à ses parents qui sont pour l’instant enterrés dans des tombes communes. Il avait aussi céder du terrain sur la question des avoirs financiers de la famille restés en Libye après leur départ en 1967.
En Israël, la communauté d’origine libyenne se chiffre à environ 100 000 personnes. Pedazur Benatia, directeur de Or Shalom, un centre culturel libyen à Bat Yam ne se montre pas très optimiste. Il n’est pas sûr que ceux qui pourraient succéder à Gaddafi soient meilleurs, en tout cas envers les juifs. Pour lui ce n’est pas demain la veille qu’il pourra retourner là-bas. L’année dernière Or Shalom avait envoyé un journaliste belgo-israélien pour faire un document sur les ruines des synagogues et des cimetières en Libye. Il avait été arrêté et retenu prisonnier pendant plusieurs mois avant que l’intervention du Ministère des Affaires Etrangères israélien n’arrive à le faire libérer.
Pour Chaim Arbiv, ancien journaliste, né à Benghazi, les manifestations qui ont eu lieu dans cette ville peuvent aussi être dues à la rivalité qui existe entre Benghazi et Tripoli. En effet Bengahzi était la capitale de la Libye jusqu'à l’arrivée au pouvoir de Gaddafi en 1969. Il dit qu’il existe même encore aujourd’hui en Israël une rivalité entre les juifs des deux villes. Il aimerait bien retourner dans la ville de son enfance, voir les rues, l’école juive qu’il a fréquentée jusqu'à son départ pour Israël. Mais lui non plus n’est pas sûr qu’un changement en Libye soit une bonne chose après tout.