Dans notre paracha, la Torah énumère les trois
premières tribus du futur peuple juif et recense
leurs différentes familles. Or lorsque le verset
évoque la descendance de Lévi, l’expression « les
chefs de familles » n’apparaît pas comme c’est le
cas chez Réouven et Shimon…
Cette « omission » est relevée
par le Chlah haKaddoch qui
l’élucide en expliquant que
cette anomalie est une allusion
au fait que les enfants de Lévi ne
furent pas astreints à l’asservissement égyptien. Néanmoins, Lévi
avait vu par prophétie qu’il en serait ainsi et désireux de partager
les souffrances de ses frères, il appela ses trois enfants du nom des
épreuves futures d’Israël : Guerchon – en allusion au fait qu’ils
étaient des « étrangers » [guer]
dans un pays qui n’était pas le
leur – ; Kéhat -pour suggérer que
leurs dents grinceraient [kéhout]
sous le poids de la servitude – ;
et Mérari – parce que la vie de ses
frères serait rendue amère [mar].
De fait, la tradition juive attache
une très grande valeur au fait
de savoir partager la souffrance
d’autrui. Le peuple d’Israël ne formant qu’un seul corps, quoi de plus
naturel que chacun de ses membres et de ses organes éprouvent de
la douleur face à l’affliction de son
propre corps ! Or, cette attitude fut
de tous temps observée par les plus
grandes figures de notre peuple.
La guerre des Six-Jours
vécue à la Yéchiva
Pendant la Guerre des Six-Jours,
le dirigeant spirituel de la yéchiva
de Poniovitch, le rav Yé’hezkel
Lewinstein zatsal, enjoignait ses
élèves à prendre conscience des
épreuves vécues par leurs frères
qui affrontaient la mort au quotidien et à partager leurs tourments
et l’inquiétude de leurs familles.
Il expliquait qu’hormis ce devoir
impérieux de « partager la douleur
d’autrui », cette attitude constituait
le fondement même de la mitsva
d’« aimer son prochain comme soi-même
» qui dicte à tout Juif de voir
son prochain réellement comme un
membre de sa famille et d’éprouver les sentiments qu’implique ce
« regard » sur son frère Juif.
Pendant la première
Guerre mondiale
Dans un ouvrage dédié à la biographie du grand maître le ‘Hafets ‘Haïm (« Le ‘Hafets-‘Haïm
– ‘Hayav ouPéoulotav »), il est relaté que pendant toute la durée de
la Première Guerre mondiale, on
pouvait lire sur les traits de son
visage la douleur qu’il éprouvait
face à la situation d’alors, comme
si chacune de ses rides portaient
en elles toute la souffrance du
monde ! Chaque parole qu’il prononçait en ces temps de souffrances était empreinte de la douleur
qu’il ressentait : ici une famille
a été disséminée, là des soldats
ont été enrôlés…
Pendant cette période, la femme
du grand maître se réveilla au
beau milieu d’une nuit et s’aperçut que son mari n’était plus dans
sa chambre. Inquiète, elle se leva
précipitamment et se mit à sa
recherche… Elle le découvrit allongé sur un banc de la cuisine,
les mains posées sous sa tête en
guise de coussin !
En réponse aux questions de son
épouse sur le choix de son nouveau « lit », le rav expliqua sur
un ton grave : « Nos frères juifs
rescapés du front se traînent dehors
vivant les affres du froid et
de la faim ; nos fils sont couchés
dans la boue des tranchées en première
ligne du front et la mort les
encercle de toute part : comment
alors pourrais-je dormir dans un
lit confortable… ? ».
Une réaction identique est rapportée concernant rabbi ‘Haïm
Soloveitchik zatsal après qu’une
grande partie de sa ville de Brisk
partit en fumée suite à un incendie dévastateur.
Pendant toute la période de reconstruction de la ville, le rav refusa catégoriquement de dormir
ailleurs qu’à même le sol – dans
le couloir de sa maison – pour
partager l’épreuve de tous ces
Juifs qui étaient encore privés
de toit…
(Extrait du Léka’h Tov sur Vaéra)
Y. Bendennoune
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