Le sort des Juifs de Syrie a toujours été très préoccupant et grâce à l’action d’une femme courageuse, plusieurs milliers d’entre eux ont pu quitter le pays entre les années 1972 et 2001. Elle a été décorée cette semaine par le président de l’Etat d’Israël, Shimon Pérès.
Il s’agissait d’une opération totalement bénévole et désintéressée, menée par une musicologue juive vivant à Toronto, Judy Feld Carr, qui voulait tout simplement aider ses coreligionnaires. En guise de reconnaissance pour l’action inlassable qu’elle a entreprise, le président de l’Etat d’Israël Shimon Pérès lui a décerné ce lundi une médaille à Jérusalem.
En fait, Judy Feld Carr a commencé par militer pour les Juifs d’URSS et ce n’est que par la suite qu’elle a découvert le sort tragique des Juifs syriens et décidé de se mobiliser pour en sauver le plus possible. Pendant près de trente ans, elle a réussi à en faire sortir plus de 3 000.
Il s’agissait, bien entendu, d’une opération ultrasecrète. Judy Feld Carr a confié au Jerusalem Post qu’elle avait entamé ses premiers contacts avec des officiels syriens en 1972, et que la première personne qu’elle avait réussi à faire sortir de Syrie en 1977, en échange d’une rançon, vivait à Alep. Son action s’est achevée avec les attentats du 11 septembre 2001 contre les Tours jumelles de New York.
Elle a précisé : « J’ai été impliquée dans le sauvetage de 3 228 Juifs sur une population de 4 500 personnes. La tâche était ardue : je ne suis pas d’origine syrienne, je suis une ashkénaze vivant au Canada ! »
Son intérêt pour les Juifs syriens a débuté par l’expédition clandestine de livres de Kodech. Elle a ensuite eu la visite d’un couple de Juifs syriens venu la voir à Toronto, qui a été déterminante pour la suite de son action. Elle reste d’ailleurs très reconnaissante envers le Canada, qui l’a aidée à mener à bien ses opérations de secours. « J’ai fait mon travail sereinement, ramassant de l’argent pendant 28 ans sans organiser de diners ou de soirées de collecte. Tout l’argent récolté provenait de ma poche et de celle de mes meilleurs amis et de membres d’un comité que j’avais fondé ».
L’argent transitait par sa synagogue où avait été créée une fondation portant le nom de son premier mari, mort d’une crise cardiaque après avoir pris connaissance de menaces de mort à l’encontre de son épouse. Bien évidemment, elle ne peut pas révéler le secret des transactions mais elle a tout de même cité des exemples: comme celui d’un jeune homme engagé dans les forces aériennes israéliennes, qui a demandé au président de l’Etat de l’époque d’intervenir pour faire sortir sa famille de Syrie. Le secrétaire du président a immédiatement contacté Judy qui a fait le nécessaire. Les Juifs partaient, soit en secret en s’enfuyant, soit après la remise d’une rançon.
Personne ne la connaissait personnellement et on communiquait avec elle par un nom de code. Judy a déjà été honorée de plusieurs décorations pour son action en faveur des Juifs de Syrie. Son histoire a été relatée dans un livre écrit par l’historien juif canadien Harold Troper : "The Ransomed of God: The Remarkable Story of One Woman’s Role in the Rescue of Syrian Jews", (Raincoast Books, Malcolm Lester Books, Toronto, 1999).
Aujourd’hui, c’est à Jérusalem, où elle possède un appartement et vit une partie de l’année, que Judy Feld Carr a été récompensée pour sa générosité et son militantisme qui ont permis à de nombreux Juifs de recouvrer la liberté.