C’était une étape importante dans le combat pour sauver l’abattage rituel ! Le travail des organisations juives a donc fini par
convaincre les députés européens. Un succès qui doit encore être validé par les ministres des 27 États membres de l’Union
européenne. Si bien que la che’hita n’est donc pas encore vraiment sortie d’affaire sur le Vieux Continent…

Les organisations juives engagées
dans le combat pour la
défense de la che’hita au
niveau européen peuvent souffler.
Au moins, le temps d’apprécier
l’importante victoire remportée au
Parlement européen ce mercredi 6
mai. Réunis en séance plénière à
Strasbourg, les députés européens
ont en effet rejeté les dispositions
qui menaçaient l’abattage rituel,
pratiqué selon les dispositions de
la Hala’ha.

Ce jour-là, lorsque les députés ont
commencé à voter, les défenseurs
de la che’hita ne cachaient pas
leur inquiétude. Pendant plusieurs
mois, ils se sont mobilisés, en coulisse,
contre le projet de la Commission
européenne d’imposer des
restrictions à l’abattage rituel.

Des mesures qui, si elles étaient
adoptées, mettraient non seulement
fin au statu quo qui prévaut dans
ce domaine depuis l’après-guerre,
mais surtout rendraient impossible
la production de viande casher en
Europe (voir ci-contre). La procédure
d’adoption d’un règlement
européen étant un long processus,
il leur a d’abord fallu convaincre
les parlementaires de déposer des
amendements contre le projet de
directive de la Commission. Un
travail de porte-à-porte mené
auprès des 785 députés du Parlement,
qui a payé une première fois
le 16 mars, lors d’une réunion de
la Commission de l’Agriculture du
Parlement.

Dûment briefés par les lobbyistes
pro-che’hita, les députés ont adopté
tous les amendements nécessaires.
L’un d’eux notamment, le numéro
28, était crucial : il s’oppose
à la possibilité offerte aux 27 États
de l’Union d’interdire unilatéralement
la che’hita.

Une première étape qu’il restait à
confirmer dans l’hémicycle : « Le
stress était immense ! Certes, je ne
pensais pas que nous sortirions
perdants… Mais pour continuer
à mener le combat dans de bonnes
conditions, il était essentiel
que les députés votent largement
dans notre sens », explique Pinhas
Kornfeld, qui, avec le grand rabbin
de Bruxelles, le rav Guigui, dirige
le Bureau européen de la Che’hita
(EBS). Rompu aux subtilités des
arcanes européennes, il a donc
vu avec soulagement la quinzaine
d’amendements relatifs à l’abattage
rituel adoptés à une confortable
majorité des deux tiers.

Mais jusqu’au bout, le fameux
amendement 28 lui a occasionné
une grosse frayeur. La veille du
vote, en effet, on apprenait que le
Parti libéral donnait à sa centaine de membres
la consigne de voter contre. Une
catastrophe. « Le dilemme était de
savoir quand réagir, raconte Pinhas
Kornfeld, ravi de sa guérilla
parlementaire. Trop tôt, cela aurait
permis à la direction du parti de
reprendre ses troupes en main.
Nous avons donc attendu la dernière
interruption de séance avant
le vote pour expliquer à chacun des
députés libéraux qu’il tenait le sort
des droits de la minorité juive entre
leurs mains. C’était un pari ».
Bonne pioche, l’amendement 28 a
été adopté par 297 voix contre 201
et 32 abstentions. Juste mais suffisant
!

Une victoire saluée par les différentes
organisations juives qui
se sont investies dans ce dossier :
« Avec ce vote c’est la première fois
que la che’hita est reconnue comme
une forme légitime d’abattage
par une instance européenne »,
souligne ainsi Henry Grunwald,
un député britannique qui dirige
Che’hita EU, l’un des organismes
mis en place pour prendre la défense
de l’abattage rituel. « L’effort
commun des différentes organisations
juives européennes est remarquable,
a pour sa part souligné
Serge Cwajgenbaum, le secrétaire
général du Congrès juif européen.
Cela montre le bon esprit qui nous
anime lorsqu’il s’agit de sujets
vitaux et cruciaux pour la vie juive
en Europe ».

De l’avis de nombreux acteurs du
dossier, l’unité affichée a posteriori
ne correspond pourtant pas vraiment
à la réalité. Jusqu’à présent,
c’est en effet plutôt la désorganisation
qui a régné dans le camp des
défenseurs de la che’hita. « Mais
le travail effectué dans la dernière
ligne droite a fini par payer », analyse,
le rav Mendel Samama, le
délégué du Beth Loubavitch aux
Affaires européennes, saluant
l’intense lobbying mené par le rav
Levi Matusof auprès des instances
européennes.

Cependant, il ne faut pas crier victoire
trop tôt : rien n’est gagné, le
vote du Parlement n’ayant en effet
qu’une valeur consultative : « Tout
ça, c’était pour la galerie, résume
Pinhas Kornfled qui a déjà repris
son bâton de pèlerin afin de
convaincre l’Executif européen.
Car parler aux députés, c’est le plus
facile. Maintenant nous devons
nous occuper de chaque pays ».
L’avenir de la che’hita est désormais
entre les mains des ministres
de l’Agriculture des 27 pays membres.
Courant juin, ils se réuniront
et se prononceront sur le projet de
directive concernant l’abattage
rituel préparé par la Commissaire
européenne à la Santé, la Chypriote
Androulla Vassiliou.

À Bruxelles, tout se joue lors des
travaux préparatoires. Il s’agit
donc avant tout de convaincre les
ambassadeurs des différents pays
et leurs experts agricoles. Ce sont
eux en effet qui négocient avec la
Commission européenne le projet
de directive présenté aux ministres
: « Nous allons travailler en
étroite collaboration avec les États
membres afin d’arriver à une décision
satisfaisante pour toutes les
communautés juives d’Europe »,
prévient Philip Carmel, le responsable
des relations internationales
à la Conférence des rabbins européens.
Mais d’ici juin, les opposants à la
che’hita comptent bien, eux aussi,
rallier les États membres à leur
cause. Et ils sont nombreux : militants
des droits des animaux, pays
interdisant l’abattage rituel (Suède,
Lettonie, Estonie), plus tous ceux
qui cherchent en réalité à limiter
l’abattage halal des Musulmans.
Reste que les organisations juives
ont pour l’instant « le vent dans le
dos ». D’autant qu’il est rarissime
que l’Union européenne adopte
une directive contraire au vote du
Parlement.

Serge Golan


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