C’est le jour du je9ne d’Esther qui a été choisi par l’organisation de la Coalition Internationale des Droits de la femme Agunah (ICAR) pour marquer un jour spécial pour ces femmes dont on ne parle pas très souvent. Une femme Agunah est une femme dont le mari refuse de donner le get, c'est-à-dire le divorce religieux. Par conséquence, elle ne peut pas se remarier ou avoir des enfants. Si elle le fait toutefois, ses enfants seront considérés comme des mamzerim et ne pourront pas se marier normalement. Batya Kahana-Dror, une des présidentes d’associations présentes dans ICAR explique que Esther symbolise bien les femmes Agunoth. En effet, elle aussi a été prisonnière d’un mariage qu’elle n’avait pas choisi.
Si l’homme ne veut pas donner le divorce à sa femme, le tribunal rabbinique est en droit d’exercer des pressions comme de le condamner à de la prison ou de le destituer de certains de ses droits. Pour Kahana-Dror une femme sur cinq qui divorce raconte qu’elle s’estime lésée dans ses droits. En effet, certains maris récalcitrants profitent du get pour faire du chantage à leur femme. Ils essaient soit de négocier le get directement contre une somme d’argent ou leur demande de renoncer à leur part du partage des biens du couple pour l’obtenir. Il est toutefois difficile de savoir exactement combien de femmes sont dans ce cas. Mais d’après une étude faite par l’Université Bar-Ilan entre 1995 et 2008, 40 000 cas de divorce ont été ouverts sans être fermés. ICAR propose d’ailleurs pour diminuer le problème de faire signer des accords prénuptiaux qui indiqueraient des pénalités financières envers la partie récalcitrante en cas de non consentement au divorce.
Mais il existe d’autres moyens et notamment un site internet un peu particulier. On le trouve à l’adresse www.rbc.gov.il. Sur ce site on peut voir des photos d’hommes avec la mention « wanted ». Mais attention, ce ne sont pas des voleurs de banques ou des tueurs en série. Non, ce sont des maris récalcitrants qui sont recherchés par les autorités rabbiniques. Sur ce site il est aussi possible d’ouvrir un dossier directement en ligne. Les coordonnées et les heures d’ouverture des tribunaux rabbiniques du pays sont en ligne comme les principales lois régissant le divorce qui sont accessibles en quelques clicks de souris.
La loi israélienne donne différentes options au tribunal rabbinique pour persuader la partie récalcitrante d’accorder le get. En effet il est possible par exemple d’annuler le permis de conduire, de suspendre une licence professionnelle comme dans le cas d’un médecin ou d’un avocat, de limiter l’accès à un compte bancaire, voire même d’annuler un passeport. La prison est aussi une option envisageable pour faire pression et obtenir le get. Mais alors s’il existe tant de solutions, pourquoi la situation de ces femmes reste elle si difficile ? La principale raison est qu’il est difficile pour les autorités rabbiniques d’exercer trop de pression sur un mari qui ne veut pas donner le divorce. En effet pour être valable aux yeux de la loi, le get doit être consenti et non imposé. Dans ce dernier cas il ne serait pas considéré comme valable, exposant la femme à de graves conséquences en cas de remariage et si elle avait par la suite des enfants. Au début du siècle dernier, le journal juif américain The Forward, publiait déjà dans ses pages les photos des maris qui refusaient de donner le get à leur épouse. Cela était fait pour attirer l’attention des communautés sur certains de leurs membres et exercer indirectement des pressions. La version internet n’est qu’une version moderne du journal The Forward. Mais quoi qu’on fasse, un mari, malgré toutes les formes de pression, a encore le droit de refuser le divorce. Les rabbins doivent donc essayer de trouver des solutions modernes pour répondre à ce grave problème qui laisse chaque année de nombreuses femmes sans véritable avenir.