Les assemblées générales du Consistoire de Paris et du Consistoire central ont été axées sur les moyens de pallier l’hémorragie démographique et les difficultés économiques auxquelles fait face la communauté juive en France.
« 30 à 40 000 Juifs ont quitté la France ces 15 dernières années. Parmi eux, de nombreux fidèles, désormais manquants, de nos synagogues ». Ce sont les conséquences de ce constat, formulé par Joël Mergui, que le Consistoire doit aujourd’hui gérer.
Et c’est ce dont il a été question au cours des assemblées générales du Consistoire de Paris et du Central qui se sont tenues, les dimanches 31 mai et 7 juin.
Première conséquence de cette situation posée par le président de l’Institution : les problèmes budgétaires. Si les comptes se redressent par rapport au précédent exercice et s’ils ont été approuvés à la quasi-unanimité (moins une abstention au « central », et trois au « Paris »), il reste que le défi est de taille. «L’hémorragie démographique est le problème numéro un. Mais il y a aussi la crise économique, la multiplication des collectes et des cacherout parallèles… Tout cela est mauvais pour nos finances », affirme Joël Mergui. « Devons-nous fermer certains lieux de culte ? », a demandé un délégué venu de province le 7 juin. « Surtout pas », a répondu le président.
Face à la pénurie, le but des cadres communautaires est de conserver les structures existantes, mais de mutualiser et rationaliser les moyens, du haut en bas de l’échelle. Le principe si cher au président Mergui, du rapprochement entre les deux institutions cultuelles, dont les relations passées étaient parfois propices à des rivalités stériles et une certaine inefficacité économique, est aujourd’hui accepté par tous. Il s’agit maintenant de trouver la formule juridique adéquate. Des avocats spécialisés y travaillent. Verra-t-on naître une structure unique ? « Pas forcément, selon Joël Mergui. Mais un seul conseil d’administration, peut-être… »
Au plan local, plutôt que de baisser les bras, il faut renforcer les liens entre les lieux de culte. Il s’agit aussi de recruter de nouveaux cadres. Des centaines d’entre eux ont réalisé leur alya. Parfois, il y a plus de postes à pourvoir que de candidats quand vient l’heure de renouveler les organes dirigeants, comme c’était le cas dernièrement à Sarcelles ou à Montpellier. Joël Mergui a rappelé, le 31 mai comme le 7 juin, qu’il comptait sur l’appui des rabbins et des « anciens » pour inciter chacun à contribuer, à la mesure de son temps libre et de ses moyens, à une vie communautaire ici et là en perte de vitesse.
Même observation concernant les cacherout non consistoriales. La difficulté est récurrente. On sait en effet que la taxe sur les produits casher est une source irremplaçable de revenus. « En temps de crise, nous ne pouvons plus nous permettre de perdre autant d’argent, lance Joël Mergui. J’ai demandé une fois encore aux uns et aux autres de prendre leurs responsabilités. La cacherout du Beth-Din de Paris est la plus grande, la plus sérieuse et la mieux contrôlée d’Europe. Elle est reconnue par les plus hautes autorités rabbiniques israéliennes, et le grand rabbin de la capitale, Michel Gugenheim, y prête une attention scrupuleuse. Il faut absolument relayer ce message. Quant aux collectes parallèles, il en existe de toutes sortes. Mais quelle association peut se vanter d’adresser régulièrement des comptes parfaitement transparents à 30 000 adhérents, à l’image du Consistoire de Paris ? Sur ce point, il faut aussi communiquer inlassablement. »
Les organisations cultuelles se sont également penchées sur le déplacement des familles juives à l’intérieur du territoire hexagonal. Ainsi, elles ont relevé qu’il était anormal que les communautés consistoriales brillent par leur absence dans certains quartiers de l’Ouest parisien, où les besoins de fidèles potentiels sont croissants. La fondation de l’ambitieux Centre européen du judaïsme, dans le 17e arrondissement, dont les travaux devraient être achevés dans deux ans, palliera partiellement ce manque. Au surplus, le Centre Edmond Fleg pour la jeunesse, situé actuellement Rive gauche, devrait se voir attribuer un nouvel espace dans le nord-ouest de la capitale.
Enfin, le ministre de l’Intérieur et des Cultes, Bernard Cazeneuve, a assisté à la clôture des travaux du Consistoire central, le 7 juin. Il a tenu à rassurer les délégués sur la question sécuritaire, alors que les années 2014 et 2015 ont été sans doute les pires qu’ait connues la communauté juive de France en termes de crimes et de propagande antisémites depuis la guerre. Le dispositif Sentinelle, qui protège tous les lieux sensibles, sera bien maintenu « au moins au-delà de l’été », a promis Bernard Cazeneuve.
Axel Gantz de hamodia.fr