Metz accueille l’une des plus anciennes communautés juives de France. Un passé marqué par la présence de géants de la
Torah comme Rabbénou Guerchom ou le Chaagat Arié. Aujourd’hui, les Juifs messins bénéficient de toutes les infrastructures
permettant une vie juive authentique et apaisée.
Le charme discret du judaïsme messin
Lorsque le préfet de la Moselle reçoit, et
que parmi les convives se trouve un
représentant de la communauté juive,
une partie du buffet est casher. Et lorsque
Chabbat arrive, on peut croiser de nombreuses
familles juives orthodoxes, poussettes
comprises, déambulant dans les rues
de Metz ! Reconnaissance publique depuis
le Concordat napoléonien (voir ci-contre),
confort dans la pratique des mitsvot grâce
au érouv et à une très ancienne implantation
locale : la communauté juive de Metz jouit
d’une qualité de vie unique en France. C’est
la preuve que le bonheur ne fait pas de bruit.
« Coincée » entre la puissante communauté
de Strasbourg et la densité de la vie juive
en Région parisienne, Metz fait en effet
rarement les gros titres de la vie communautaire,
en dehors de certains événements
comme la Hilloula du Chaagat Arié (voir
ci-contre) : « Avec 600 familles, nous sommes
une kéhila de taille moyenne, et comme
toutes les communautés de province, nous
nous battons pour nous maintenir à niveau
et faire échec au déficit démographique, explique
le grand rabbin de la Moselle, Bruno
Fiszon. Mais ce serait une erreur de s’arrêter
à ce seul critère ». Manière de dire que le dynamisme
fait toute la différence. Il est vrai
qu’à son échelle, la communauté de Metz a
tout d’une « grande ». Elle propose ainsi à ses
membres toutes les structures éducatives, du
gan en passant par l’école primaire, jusqu’au
collège. Elle dispose également de sa propre
casherout, certifiée par le dayan local, rav
Bamberger (voir interview), d’une boucherie,
d’une maison de retraite, d’un mikvé et
d’un cimetière ! Quant au
Kollel subventionné par le
consistoire local et par des
donateurs, il n’accueille
que deux avré’him, mais
au moins, il tourne !
Pour Chabbat, les fidèles
messins ont l’embarras
du choix, grâce aux cinq
synagogues que compte
la ville : la grande synagogue,
la synagogue
polonaise Adath Yechouroun
de rite sfard, l’oratoire
Paul Lazarus où l’on
suit le rite alsacien, la synagogue séfarade
Beth Yossef, et l’oratoire Paul Michaux.
Mieux encore, il est possible d’y prier tous
les jours en minyane, matin et soir, grâce à
un principe ingénieux que résume le grand
rabbin Fiszon : « Nous avons mis en place
un roulement : chaque semaine, nous nous
réunissons dans une synagogue différente
pour prier ».
Cette solidité que semblent dégager les institutions
communautaires locales est le fruit
de l’Histoire. La préfecture de la Moselle
abrite en effet l’une des plus anciennes communautés
juives de France. Probablement
arrivés avec les armées romaines, les Juifs
sont présents à Metz dès le 9è
siècle de l’ère vulgaire. C’est
là que naît, vers 960, Rabbénou
Guerchom, dont l’immense
renommée lui vaut le
titre de « Lumière de l’Exil »,
Méor Hagola. Rabbin de la
ville, il influença avec ses
élèves sur tout le judaïsme
européen. On lui doit notamment
plusieurs décisions
hala’hiques qui s’imposent
encore aux communautés
ashkénazes, comme l’interdiction
de la polygamie.
Régulièrement chassés de la
ville puis rappelés, en fonction
des mesures antijuives
ou des besoins en commerçants
expérimentés, les Juifs
trouvent au fil des siècles
leurs marques dans Metz,
bien qu’ils restent confinés
dans les limites du ghetto, l’un des plus
anciens d’Europe. On voit encore d’ailleurs
un peu partout les traces de cette présence,
comme l’ancienne synagogue datant du 14è
siècle. Désormais propriété d’une personne
privée, le Consistoire de la Moselle a essayé
de la racheter en vain : « À la veille de la
Révolution française, la ville était devenue
un grand centre de Torah, souligne le grand
rabbin Fiszon. Avec plus de 2000 membres,
la communauté juive locale était la plus importante
de France ». Un prestige qui attire
les meilleurs rabbanim de l’époque et entraîne
l’ouverture d’une école rabbinique de renom.
C’est d’ailleurs elle qui fut choisie pour
devenir le premier Séminaire rabbinique de
France. Et lorsque, au 19è siècle, on s’inquiéta
de renforcer un judaïsme parisien bien
mal en point, ce fut sur les bords de la Moselle
que l’on vint chercher des rabbins. « À
l’époque, les Juifs de Metz étaient réputés
pour leur respect d’une vie juive authentique.
Aujourd’hui, on dirait “froum” », note
fièrement le Dayan, rav Bamberger.
Et si le mouvement s’inversait ? Après
tout, la ville a tout pour plaire aux familles
à la recherche d’une vie juive authentique,
sans les inconvénients de la région parisienne.
Et puis, avec le TGV, Metz est désormais
à 1h 25 de la gare de l’Est, à Paris.
D’ailleurs, il y a quelques mois, les responsables
de la communauté messine avaient
lancé une discrète campagne de promotion
de la yiddishkeit mosellane : après tout, le
soleil aussi se lève à l’Est !
Serge Golan
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