Ils sont 843, très enthousiastes et surtout conscients d’arriver à l’heure des premiers grands choix. Pour les élèves des classes de terminale de 21 écoles et lycées juifs de France réunis, jeudi dernier en après-midi et en soirée, au palais de la Nation à Jérusalem, il s’agira en effet de bientôt décider de tenter – ou non – l’aventure israélienne, une fois le bac en poche. Joyeuse et informative, cette soirée était l'un des points d’orgue d’un voyage éducatif organisé en Israël dans le cadre du projet « Bac Blanc Bleu », dont la huitième édition se déroulait ces jours-ci. Destiné à leur présenter les différentes options d’études post-bac, ce projet est mis en place, cette année, par la section religieuse de l'Expérience Israélienne et par le département de l'Education de l'Agence Juive.
Dans le hall du palais de la Nation, une quarantaine de stands attendaient donc les lycéens français, représentant les 38 programmes francophones qui leur sont proposés parmi 150 programmes universitaires ou religieux affiliés au programme Massa. Au lieu de pousser à tout prix des jeunes gens mal préparés à l’alya, l’Agence Juive met en effet désormais en avant la possibilité de passer une ou plusieurs années d’études en Israël. Adapté aux spécificités de la communauté juive de France, le large échantillon présenté ce soir-là, faisait la part belle aux yéshivot et aux séminaires, à côté des traditionnelles universités.
« Le principe du Bac Bleu Blanc, c’est de respecter le profil des écoles qui y participent. Pour le public français, on met donc un accent particulier sur l’identité religieuse », explique Aurélie Elkouby, l’une des organisatrices. Mais s’il prend la forme d’un voyage d’étude chargé de convaincre les hésitants et de convaincre les élèves déjà décidés à tenter l’aventure, cette semaine israélienne est d’abord un but en soi. « Notre objectif est également de renforcer le lien avec Israël pour ceux qui resteront en France », assure Daniel Benaïm, le directeur et artisan principal du Bac Bleu Blanc. « L’an prochain, la plupart d’entre eux quitteront le cadre scolaire juif dans lequel ils étaient préservés de l’assimilation, pour l’université : ce voyage sert aussi à les inciter à rester actifs au sein de la communauté ».
Pour l’instant, Teddy et Samuel, deux élèves du lycée Otsar Hatorah de Sarcelles, n’imaginent pas de rester en France l’an prochain. Le premier veut être ingénieur et s’est déjà pré-inscrit au Ma’hon Lev de Jérusalem. Quant au second, qui hésite encore sur son avenir, il sait déjà qu’il passera – « au moins » – un an dans une yéchiva israélienne : « Il y a un large choix pour les francophones. Je pense par exemple à Beit Halévy que nous avons visité. Nous y avons rencontré plusieurs anciens de notre école et ils sont très contents ». Mais la vraie surprise pour la cinquantaine de lycéens de Otsar Hatorah a été la découverte de la yéchivat Hévron. Samuel en est encore ému : « L’intensité du Limoud quand nous sommes entrés dans le beth hamidrash de la yéchiva ! » Et encore, lui et ses copains n’ont pas tout vu : ce dimanche, le programme prévoyait une journée à Bné-Brak, avec un arrêt aux yéchivot Poniowicz et Kéter Chlomo et surtout, le grand moment de ce voyage : une visite au domicile du gaon rav Aaron Leib Steinman chlita, qui chaque année, réserve un quart d’heure aux lycéens du Bac Bleu Blanc pour leur rappeler l’importance d’être des Bné Torah !
« Pour beaucoup de nos élèves, c’est l’occasion de prendre conscience de la grandeur du monde de la Torah en Israël. Ils sont presque tout déjà venus ici en vacances, mais c’est un aspect qu’ils ignorent », analyse le rav Chlomi Elhadad, qui encadre les garçons de Otsar Hatorah.
Destiné à promouvoir la montée en Israël, le programme du Bac Bleu Blanc laisse en effet aux écoles orthodoxes une très grande liberté pour mettre en place un circuit qui corresponde à leurs exigences en matière de mitsvot et à l’accent qu’elles mettent sur le Limoud. C’est d’ailleurs l’une des conditions de la participation de ces dernières à l’opération.
« Pour nous, il est par exemple, essentiel que les hôtels dans lesquels nous sommes logés soient cachers laméahdrin, expliquent Rivka Belinov et Sandrine Perez, qui encadrent les 25 lycéennes de l’école Sinaï, où elles enseignent respectivement le kodech et l’économie. « Mais il n’est pas besoin d’insister, les organisateurs connaissent parfaitement nos critères ».
Outre le passage obligé au Kotel et le rassemblement en présence du grand rabbin d'Israël, le rav Chlomo Amar (voir encadré), sans lequel un voyage du Bac Bleu Blanc ne serait pas complet, les jeunes filles de l’école Loubavitch on pu visiter plusieurs endroits liés au mouvement : le Beth ‘Habad de Sdérot, Kfar ‘Habad et bien sûr le séminaire Beth ‘Hanna à Safed. Et le voyage semble porter ses fruits, puisque chaque année, plus de la moitié des bachelières de Sinaï rejoignent un séminaire en Israël, qu’il soit Loubavitch ou non. « A leur retour, nos élèves sont transformées, plus mûres. Après avoir visualisé les options qui les attendent en Israël, elles sont beaucoup plus concentrées en classe », confient les deux enseignantes. « Cette semaine est un tournant décisif dans l’année scolaire ».
Près du Kotel
La bénédiction emue du rav Chlomo Amar
Cette année encore, le grand rassemblement de tous les participants au Bac Bleu Blanc qui s'est tenu motsaeï Chabbat dans le parc archéologique de Davidson à proximité du Kotel a marqué le paroxysme spirituel de cette semaine de découverte d'Israël.
Et comme au cours des sept précédentes éditions du BBB, le grand rabbin d'Israël, le Richon lé Tsion, rav Chlomo Moché Amar, a tenu à être présent pour délivrer un enseignement de Torah que les jeunes de « terminales » conserveront gravé dans leur mémoire.
Le rav a ainsi demandé aux jeunes d'approfondir leur étude du livre de Chemot relatant l'oppression d'Egypte mais aussi et surtout la Délivrance. Rappelant les événements de la guerre des Six-Jours, le rav Amar s'est souvenu que les gens croyaient rêver lors de l'annonce de la libération du Kotel : « Lorsque le Machia'h arrivera, nous aurons – comme le dit le Psaume – l'impression de rêver. Mais cela dépend de nous et de notre désir de nous rapprocher de D.ieu ! Profitez donc de ces instants particuliers pour aspirer à la sainteté de ce lieu ! », a dit le rav Amar, qui a ensuite récité avec une émotion très perceptible le « Chema Israël », ensuite repris avec ferveur par tous les participants.
Avant de prendre congé, le rav a aussi béni tous les jeunes du « Bac Bleu Blanc » et leur a souhaité une longue vie et beaucoup de chance dans ce qu'ils entreprendront.
Serge Golan
Publié en partenariat avec l'hebdomadaire Hamodia en français.