La Yéchiva, un état d’esprit
(1 ère partie)
Par le Rav Eliahou Elkaïm
«Multiplier l’audience, c’est multiplier la sagesse» Derrière ces quelques mots énigmatiques, c’est tout un monde secret qui se cache, et que nous allons tenter de découvrir…
«Il disait: ‘Multiplier la chair, c’est multiplier les vers multiplier les richesses, c’est multiplier les soucis multiplier les femmes, c’est multiplier la sorcellerie multiplier les servantes, c’est multiplier la débauche multiplier les esclaves, c’est multiplier les vols. Multiplier la Thora, c’est multiplier la vie multiplier l’audience, c’est multiplier la sagesse multiplier les conseils, c’est multiplier l’intelligence multiplier la charité, c’est multiplier la paix. Acquérir un bon renom, c’est acquérir pour soi-même acquérir la connaissance de la Thora, c’est acquérir la vie du Monde futur.’»
(Chapitre 2, Michna 4)
‘Multiplier l’audience, c’est multiplier la sagesse’: Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous remarquerons que Hillel ne parle pas de Thora de façon générale, comme quand il disait: ‘Multiplier la Thora, c’est multiplier la vie’.
A présent, il emploie le terme de sagesse (‘ho’hma).
Mais de quelle sagesse s’agit-il?
Un texte du Talmud (Baba Metsia) nous éclaire. La Michna (2-11) nous enseigne que si un homme trouve deux objets qui ont été égarés, l’un par son père, l’autre par son maître en Thora, il doit d’abord restituer celui qui appartient à son maître.
Enseignement étonnant quand on sait l’importance de la mitsva d’honorer son père et sa mère (kiboud av vaèm)?
Cela est dû au fait que le père est à l’origine de la vie matérielle (olam hazé) alors que le maître en Thora donne accès à la vie future et éternelle (olam haba).
Lorsqu’un père est aussi un maître en Thora, son fils doit lui donner la préséance.
La Guemara: un état d’esprit
Le Talmud ajoute: nos maîtres ont enseigné (c’est l’avis notamment de Rabbi Méïr) que le maître dont parle la Michna, c’est celui qui lui a enseigné la sagesse (‘ho’hma) et non celui qui lui a seulement enseigné l’Ecriture et la Michna. (Baba Metsia 33a).
Rachi explique: «La sagesse (‘ho’hma) signifie l’approfondissement des règles de la Michna, le discernement qui permet d’éluder d’apparentes contradictions entre différentes michnayot, enfin les motifs des lois qui permettent ou interdisent, et de celles qui fixent qui doit payer ou être exempté. C’est ce que le Talmud appelle la Guemara» (Rachi ibid.)
Nous avons donc une définition très claire de ce concept de sagesse tel qu’il est perçu par nos maîtres.
On retrouve la même idée dans le Talmud Bera’hot: «Certains sont d’avis que le statut d’ignorant (am haaretz) s’applique même à celui qui a étudié l’Ecriture et la Michna, mais qui n’a pas joui de la proximité de Sages en Thora (lo chimechtalmidé ‘ha’hamim).
Rachi explique: «Il s’agit de l’étude de la Guemara qui est essentiellement une formation de l’esprit qui permet de saisir le sens profond des enseignements de la Michna.» (Bera’hot 47b- Rachi ibid.)
Un dernier texte nous apporte une indication supplémentaire concernant l’importance primordiale de l’étude de la Guemara.
Le Talmud interprète le verset:
«Je vais te donner les tables de pierre, la doctrine (Thora) et les préceptes (mitsva) que j’ai écrit pour leur instruction(lehorotam) » (Exode 24-12)
La Thora, c’est la loi écrite. Lamitsva, c’est la Michna. Lehorotam, c’est la Guemara.
Rachi explique que Lehorotam est utilisé ici pour exprimer l’étude de la Guemara, car c’est seulement à travers une compréhension en profondeur des enseignements de la Michna que l’on peut éluder des questions légales (hala’ ha), substance de la Horaa (prise de décision juridique, de la même racine que Lehorotam).
Ceux qu se contentent de la connaissance de la Michna pour fixer la hala’ha sont appelés par le Talmud (Sota 22a) les destructeurs du monde (mévalé olam), car ils sont incapables d’analyser les cas qui se présentent à eux et d’y apporter la solution juste (Talmud Bera’hot 5a, Rachi ibid.).
La proximité des Sages
On la voit, la sagesse (‘ho’hma) dont parlent nos maîtres est une science très particulière que peut acquérir uniquement celui qui a été formé par des maîtres en Thora, et qui a investi de longues années dans l’étude de la Guemara, selon le sens donné par le Talmud.
Mais il ne faut pas s’y tromper: ce que nous appelons aujourd’hui la Guemara est l’ensemble des textes du Talmud, textes qui étaient une science orale à l’époque des maîtres du Talmud.
La Guemara, selon la définition de cette époque, était une formation de l’esprit, une méthode d’analyse des textes, et une réflexion qui se transmet de maître à élève, ne pouvant s’acquérir par une simple étude des textes.
Cette méthode de réflexion se développe notamment au Beit hamidrach, les élèves aiguisant leur esprit par une étude en groupe, où chacun participe et apporte de lui-même.
Aujourd’hui, on utilise le terme de Guemara, pour parler de l’étude du Talmud, et certains peuvent penser faire de la Guemara quand ils étudient un texte du Talmud, notamment en autodidacte. Mais la Guemara, c’est, comme nous l’avons vu, une méthode globale de réflexion, qui ne peut se transmettre que de maître à élève.
Rabbi Israël Salanter est très clair:
«La Guemara consiste en une formation de l’esprit, une analyse des textes, et une recherche de tous les éléments disséminés dans le Talmud et les écrits des commentateurs ayant un rapport avec le sujet à régler.
C’est de cette formation de l’esprit dont parlent nos maîtres lorsqu’ils expliquent que: «Celui qui n’a pas jouit de la proximité des sages (talmidé ‘ha’hamim), ne possède pas cette formation. Il a par conséquent le statut d’ignorant (Am Haaretz).
Si la connaissance des textes du Talmud, des Richonim et même des A’haronim, n’est pas accompagnée d’une méthode directement acquise de la bouche des maîtres en Thora, et développée au Beth Hamidrach, elle correspond seulement au niveau de celui qui a étudié la Michna à l’époque des maîtres du Talmud, sans avoir acquis la connaissance de la Guemara (Or Israël chap 18).
Le Gaon de Vilna cite, en référence à notre Michna, un texte du Talmud (Taanit 7a), par lequel il fait allusion aux éléments que nos venons de développer.
«Rabbi Hama bar ‘Hanina commente le verset dans les Proverbes:
«Le fer se polit au contact du fer» (27-17)
De la même façon qu’un morceau de fer en polit un autre, deux Sages aiguisent mutuellement leur esprit par une étude en commun. (…)
C’est ce que Rabbi Hanina a enseigné: ‘J’ai beaucoup appris de mes maîtres, plus encore de mes compagnons d’étude, et plus encore de mes élèves’.
On le voit, cette formation de l’esprit se fait en trois temps: d’abord par la transmission du maître, qui apporte sa sagesse ensuite par ce que l’on appelle ‘Dibouk ‘haverim’, l’affinement de l’esprit amené par l’étude en groupe enfin, l’enseignement que les élèves apportent au maître par leurs questions et leur vision des choses…»
Nous découvrirons la semaine prochaine le concept de Yéchiva, et en quoi il est intimement lié à cette sagesse dont parle Hillel.
Chabbath Chalom
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La Yéchiva, un état d’esprit
(2 ème partie)
Par Rav Eliahou Elkaïm
Cette semaine, nous allons tenter de pénétrer un monde parfois inconnu, celui de la Yéchiva. Le seul endroit au monde où l’on peut discerner la volonté de D.ieu…
«Il disait: ‘Multiplier la chair, c’est multiplier les vers multiplier les richesses, c’est multiplier les soucis multiplier les femmes, c’est multiplier la sorcellerie multiplier les servantes, c’est multiplier la débauche multiplier les esclaves, c’est multiplier les vols. Multiplier la Thora, c’est multiplier la vie multiplier l’audience, c’est multiplier la sagesse multiplier les conseils, c’est multiplier l’intelligence multiplier la charité, c’est multiplier la paix. Acquérir un bon renom, c’est acquérir pour soi-même acquérir la connaissance de la Thora, c’est acquérir la vie du Monde futur.’»
(Chapitre 2, Michna 4)
Nous poursuivons donc cette semaine notre développement sur les mots de Hillel: «Multiplier l’audience, c’est multiplier la sagesse».
La semaine dernière, nous avons découvert ce que recouvre le concept de sagesse pour Hillel: une formation de l’esprit qui se fait en trois temps.
d’abord par la transmission du maître, qui apporte sa sagesse.
ensuite par ce que l’on appelle ‘Dibouk ‘haverim’, l’affinement de l’esprit amené par l’étude en groupe.
enfin, par l’enseignement que les élèves apportent au maître grâce à leurs questions et leur vision des choses…
Ce concept de sagesse est intimement lié à celui de Yéchiva.
Comment? Pour le comprendre, il faut d’abord découvrir l’origine et le sens du terme yéchiva.
Par la bouche de tes enfants
Deux textes de nos maîtres vont nous apporter un premier éclairage.
«Rabbi ‘Hama bar ‘Hanina dit: ‘Depuis le début de leur histoire, nos ancêtres (étaient attachés) à la Yéchiva. Lorsqu’ils étaient en Egypte, la Yéchiva étaient avec eux. Dans le désert, la Yéchiva était présente.
Abraham notre aïeul était un ancien qui fréquentait la Yéchiva Isaac aussi Yaakov aussi Eliezer, le serviteur d’Abraham était lui aussi attaché à la Yéchiva.’»
(Talmud Yoma 28b)
Rabbénou Hanaël (l’un des derniers sages de l’époque des Gaonim), précise dans son commentaire que le concept d’«ancien fréqentant la Yéchiva» (zaken veyochev bayéchiva) a pour signification que la présence divine (che’hina) reposait sur celui qui fréquente la Yéchiva.
Un deuxième texte du Midrach Tan’houma:
«(…) Car D.ieu a conclu son alliance avec Israël seulement sur la loi orale (Thora che béalpé).
C’est ainsi que nos maîtres ont interprété le verset dans l’Exode:
«Car c’est sur la base (al pi, qui peut se lire al pé) de ces paroles que J’ai conclu mon alliance avec toi et avec Israël» (Exode 34-27)
Il s’agit donc de la loi orale qui constitue le fondement de l’alliance entre D.ieu et Son peuple.
Pourtant, cette loi orale est l’objet de bien des souffrances (dues l’investissement intellectuel intense qu’elle implique, n.d.l.r). Elle est même comparée à l’obscurité, comme il est écrit:
«Le peuple qui marchait dans l’obscurité verra une grande lueur»
(Isaïe 9-1)
Il s’agit de ceux qui se sont investis dans l’étude du Talmud, et qui verront une grande lumière. Car D.ieu leur ouvre les yeux pour découvrir ce qui est permis et ce qui est interdit, ce qui est pur et ce qui est impur.
D.ieu a également contracté une alliance avec Israël, qui fera que la loi orale ne sera jamais oubliée, traversant les générations jusqu’à la fin des temps, comme l’exprime le verset:
«Quand à moi, dit l’Eternel, voici quel est mon pacte avec eux Mon inspiration qui repose sur toi (le prophète, n.d.l.r.) et les paroles que J’ai mises en ta bouche ne doivent pas s’écarter de ta bouche, ni de la bouche de tes enfants, ni de celle des enfants de tes enfants, ni à présent ni dans le futur et jusqu’à la fin des temps» (Isaïe 59-21)
C’est pour préserver ce pacte que D.ieu a institué deux Yéchivot principales en Israël, où les étudiants méditaient jour et nuit, et où tous les maîtres en Thora, venus de tout le pays, délibéraient deux fois par an, en Adar et en Elloul.
Au cours de ce que l’on appelle la «guerre de la Thora» (mil’hamta chel Thora), chacun apportait ses arguments, les preuves de son raisonnement tiré des Ecritures: de la Michna et du Talmud.
C’est ainsi que les sujets sont traités jusqu’à ce qu’ils soient réglés, et que la solution soit découverte.
Ainsi, le peuple d’Israël ne trébuche pas dans les sujets légaux (hala’ha) comme l’exprime le verset:
«Un grand bonheur attend ceux qui aiment Ta loi pour eux, point de chute» (Psaumes 119-165)
«Que l’Eternel donne la force à son peuple! Que l’Eternel bénisse son peuple par la paix» (Psaumes 29-10)
Ces deux Yéchivot n’ont jamais souffert de la captivité, ni à être contrainte au parjure, ni même à subir des dommages matériels, et n’ont jamais dû supporter l’emprise de Yavan (les Grecs) ni de Edom (les Romains).
D.ieu les a fait sortir de Jérusalem, avec leur Thora et leur connaissance, douze ans avant sa destruction.»
(Midrach Tan’houma Parachat Noa’h)
On le voit, la Yéchiva existait déjà à l’époque des patriarches, et elle est intimement liée à l’existence du peuple juif et à une alliance inaltérable avec D.ieu.
Le texte du Midrach Tan’houma nous permet de mieux comprendre le sens profond de la Yéchiva: c’est en elle, est seulement en elle que l’on trouve la réponse à toutes les questions de hala’ha, dans toute leur subtilité.
La substance du concept de Yéchiva réside en un travail acharné de recherche, où se confrontent les esprits les plus aiguisés en Thora.
C’est l’endroit où ceux qui se lient à la loi orale, loi dont D.ieu veut qu’elle soit l’apanage du peuple juif à travers les âges, forgent leurs connaissances et leur raisonnement.
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La Yéchiva, un état d’esprit
(3 ème partie)
Par le Rav Eliahou Elkaïm
Pour conclure notre étude sur les mots de Hillel ‘multiplier l’audience, c’est multiplier la sagesse’, il nous faut pénétrer l’un des concepts les plus fondamentaux de la tradition juive: l’étude conjointe.
«Il disait: ‘Multiplier la chair, c’est multiplier les vers multiplier les richesses, c’est multiplier les soucis multiplier les femmes, c’est multiplier la sorcellerie multiplier les servantes, c’est multiplier la débauche multiplier les esclaves, c’est multiplier les vols. Multiplier la Thora, c’est multiplier la vie multiplier l’audience, c’est multiplier la sagesse multiplier les conseils, c’est multiplier l’intelligence multiplier la charité, c’est multiplier la paix. Acquérir un bon renom, c’est acquérir pour soi-même acquérir la connaissance de la Thora, c’est acquérir la vie du Monde futur.’»
(Chapitre 2, Michna 4)
Cette semaine, nous concluons notre développement sur le concept de Yéchiva, à partir des textes du talmud et du Midrach Tan’houma.
On y découvre, dans le langage de nos maîtres, la place occupée par la Yéchiva au sein du peuple juif tout au long de son histoire.
Nous commencerons par l’explication du terme Yéchiva, dont la racine est: s’asseoir. Dans la Thora, ce terme exprime l’assiduité et la capacité de séjourner longtemps au même endroit.
«Vous demeurâtes (vatechevou) de longs jours à Kadech» (Deutéronome 1-6)
Poursuivons par les mots du Midrach, qui sont éloquents: «La Yéchiva est l’âme même de l’alliance éternelle entre D.ieu et Israël, et c’est en son sein que se transmet et se dévoile la lumière cachée (or haganouz) de la loi orale (Thora chébéalpé)».
On se souvient du texte du Midrach:
«C’est pour préserver ce pacte que D.ieu a institué deux Yéchivot principales en Israël, (…)
Ces deux Yéchivot n’ont jamais souffert de la captivité, n’ont jamais été contraintes au parjure, ni même subi des dommages matériels, et n’ont jamais dû supporter l’emprise de Yavan (les Grecs) ni de Edom (les Romains).
D.ieu les a fait sortir de Jérusalem, avec leur Thora et leur connaissance, douze ans avant sa destruction.»
* Assurance tous risques
On le constate, il y a dans ce texte, deux affirmations distinctes.
La première concerne l’existence matérielle de ces institutions, qui n’ont pas subi la captivité, ni les sanctions matérielles: la raison est certainement une protection divine très spéciale, accordée par leur mérite.
La deuxième affirmation concerne un aspect plus spirituelle: ces deux Yechivot n’ont jamais été contraintes à nier leur foi, ni à subir l’influence des Grecs et des Romains.
Pourquoi? Car la Yéchiva, comme fondation, crée une protection parfaite qui protège de toute assimilation aux notions étrangères négatives.
La Yéchiva est garante de la pérennité de la Thora en Israël, dans la même forme qu’elle a été transmise au Mont Sinaï.
Le Midrach précise en outre que deux fois par an, les Sages devaient se réunir au sein de la Yéchiva pour délibérer sur les questions de droit (hala’ha) et donner leur verdict.
Ce rassemblement avait pour but d’éviter toute erreur et tout changement de l’héritage transmis par Moïse.
Ce rassemblement deux fois par an, est en réalité un concept inné à la Yéchiva, qui exige une étude en groupe, ‘haboura.
Le Talmud explique à de nombreuses occasions les raisons de cette étude en commun:
« ‘Fais silence (‘hassket) et écoute Israël’ (Deutéronome 27-9)
Le terme ’hassket est interprété par le Talmud dans le sens de former des groupes (assou kitot kitot) pour étudier la Thora, car cette dernière s’acquiert uniquement par une étude en groupe.» (Talmud Bera’hot 63b)
Il est clair que cette obligation d’étudier en groupe s’applique exclusivement à l’étude de la Guemara, et non à celle des Ecritures et de la Michna.
* Quoi de neuf?
C’est dans ce sens que nous pouvons comprendre les mots du Talmud (‘Haguiga 3a):
«Un jour, Rabbi Yo’hanan ben Beroka et Rabbi Eléazar ben ‘Hisma sont allés rendre visite à Rabbi Yéhochoua à Pekiïn.
Ce dernier leur posa une question:
« – Quelle a été l’idée nouvelle (‘hidouch) découverte au Beth Hamidrach aujourd’hui?
Nous sommes tes disciples et ce n’est pas à nous de parler devant toi
Pourtant, il n’y a pas de Beth Hamidrach sans ‘hidouch parlez donc.»
On le voit dans cet échange, l’idée nouvelle est le résultat d’une étude en commun, au Beth Hamidrach.
Rachi dans Baba Metsia (33a), décrit les étudiants de la Yéchiva de Babylonie:
«Ils étaient assis au Beth Hamidrach, toute la journée ensemble, l’un posant une question, l’autre trouvant la solution, et c’est ainsi que chacun apprenait de l’autre.»
* La présence divine
On le voit, l’étude en commun est fondamentale. Est-ce lié à l’affirmation de Rabbénou Hananaël, que nous avons cité dans la semaine dernière:
Il commentait l’expression‘les anciens qui fréquentaient la Yéchiva’, qui désignait les patriarches, en disant: ‘cela signifie que la présence divine (che’hina) était parmi eux.’
Mais sur quelle base fait-il une telle affirmation? Un texte du Talmud (Bera’hot), va nous aider à le découvrir:
«Rabbi ‘Hisda commente le verset:
«L’Eternel aime les portes de Sion (chaarei Tzion), mieux que toutes les demeures de Jacob» (Psaumes 87-2)
L’Eternel aime les enceintes où se réunissent les groupes qui étudient la hala’ ha (chearim hametsouyianim bahala’ha), mieux que les synagogues.
Cela correspond à ce que Rabbi ‘Hiya bar ami dit au nom de Oula: «Depuis la destruction du Temple, D.ieu ne réside dans ce monde que dans les quatre coudées de la hala’ ha.» (Talmud Bera’hot 8a)
Rabbénou Yona (ibid.) précise: «Il s’agit des lieux où l’on étudie ensemble avec assiduité, de façon fixe et permanente.»
Et le Maharcha de préciser: «Cette préférence de D.ieu va vers les lieux d’étude où l’on apprend non seulement les Ecritures et la Michna, mais également où l’on parvient à discerner la hala’ha à travers l’approfondissement et l’analyse des textes.
Lorsque le Temple existait, c’est en son sein que se trouvait le siège du Sanhédrin (lichkat hagazit), où l’on résolvait les problèmes de hala’ ha.
La présence divine s’y trouvait.
Depuis la destruction du temple, ces quatre coudées de la hala’ha, qui représentent le lieu où se rassemblent ceux qui étudient le Talmud, jouissant ainsi de la che’hina à l’image du Sanhédrin, ces quatre coudées circonscrivent aujourd’hui l’enceinte de la Yéchiva.
On comprend mieux à présent les mots de Rabbi Hananaël. C’est cette étude en commun, cette volonté de débattre ensemble et de confronter sa réflexion qui permet la présence de D.ieu.
L’idée de Hillel apparaît donc dans toute sa globalité: «Multiplier la Yéchiva, c’est multiplier la sagesse».
Chabbath Chalom