L’histoire du Rav Israël Meir Lau, sauvé par son grand frère pendant la Shoah, est relatée dans le livre "Loulek" qu’il a écrit il y a quelques années. Au cours de cette terrible période, un événement est survenu, qui les a marqués à vie, avec des rebondissements incroyables une quarantaine d’années plus tard.
Après la guerre, le Rav Lau et son frère sont montés en Israël. Les années se sont écoulées et une nouvelle vie a commencé pour ces deux rescapés qui ont fait une belle carrière en Israël. Mais ils n’ont jamais oublié les airs chantés à la maison, et l’une des mélodies est restée gravée dans leur mémoire : l’air de Mikdach Meleh’, tiré du Leh’a Dodi, chanté dans l’office du vendredi soir.
Le Rav Lau raconte : « Nous étions dans un camp de travail en Pologne. C’était l’hiver, juste avant Hanouca. Soudain, d’une grande masure glaciale et humide, mon frère a soudain entendu une mélodie connue ». Naphtali Lau a alors demandé à son petit frère de l’attendre un instant.
Lorsqu’il est entré dans la cabane, il a reconnu celui qui chantait cet air ; il s’agissait du compositeur lui-même, le Hazan Yossef Mendelbaum. Mais il était sans barbe. Il était assis sur le sol, psalmodiant Mikdach Meleh', du Rabbi de Bobov, qui convenait parfaitement à la situation des Juifs de cette époque. Et pourtant, ce chant a su lui donner du courage, une nouvelle inspiration et un sentiment d’élévation spirituelle.
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Le Rav Lau raconte encore : « Mon frère Naphtali se souvenait de cet air qu’il avait entendu à Cracovie. Il était fredonné lors des visites du Admour Hakedouchat Tsion. Cette mélodie suscite tout de suite une nostalgie indescriptible. Pour le remercier de ce chant qui l’avait ramené un bref moment à une époque merveilleuse, mon frère lui a offert un livre de Mikraot Guedolot, avec la dédicace de notre oncle, contenant les cinq livres de la Tora. Il se séparait d'un véritable trésor, à ses yeux ».
Et de poursuivre son récit : « Une semaine plus tard, nous sommes arrivés au camp de Buchenwald. Et là, dans un tas d’affaires amoncelées devant les fours crématoires, nous avons reconnu les volumes que Naphtali avait donnés au Hazan Yossef Mendelbaum. Nous avons alors compris qu’il avait été assassiné ».
« Quarante ans plus tard, raconte encore le Rav Lau, mon frère Naphtali a pris ses fonctions de consul général d’Israël à New York. Il en a profité pour rendre visite au Admour de Bobov zt’sl et il lui a raconté cette histoire. Quelques minutes plus tard, entre dans la pièce un Juif barbu d’un certain âge et le Rabbi dit alors à mon frère en yiddish: voici Yossef Mendelbaum. Et ce dernier s’est mis à chanter son air. Mon frère a alors revu en mémoire tous ces hassidim du camp écoutant avec ferveur le Hazan avant de connaître une mort horrible » .
Ce chant a été repris et il fait partie à présent d’un projet intitulé "Nigoun Haolé min Ha’afar", « le chant qui monte des cendres », réalisé par le Rav Granot et ses associés Hilik Frank et Naor Carmi, grâce à l’initiative de l’organisation Hamoussaph. Il est présenté par le centre de recherche de la Shoah de la Mih’lala de Jérusalem.
Dans le cadre de ce projet, douze mélodies, dont celle-ci bien évidemment, sont interprétées par l’orchestre "Halev VeHamaayan" et un album est déjà en préparation. Il devrait sortir au cours de l’année.
Pour le Rav Granot, le message de ce projet n’est pas uniquement que des vies ont été sauvées. « Pour moi, ce qui est essentiel, c’est qu’ils chantaient. Malheureusement, au cours de la Shoah, de nombreux événements se sont déroulés où finalement, les Juifs n’ont pas eu la vie sauve. L’accent est mis ici sur la force de l’âme, la Nechama. Alors qu’ils marchaient vers la mort, dans ces camps d’extermination, ces Juifs ont essayé de chanter, pour tenter de faire sortir quelques étincelles de l’obscurité la plus totale ».
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