UN GRAND sage d’Israël demanda
un jour : « Pensez-
vous vraiment que ce
qu’on appelle la «Torat haNistar»
[littéralement : la Torah du sens
caché] se trouve au rayon «Kabbala
» des librairies juives ? ».
Cette question resta non seulement
sans réponse, mais aussi
sans l’ombre d’un commentaire…
Et c’est sous le poids de cette interrogation
pour le moins paradoxale
que l’assemblée qui était
venue l’écouter se dispersa dans
Jérusalem au beau milieu d’un
mardi après-midi ensoleillé !

Le sens caché n’équivaut-il pas
en effet à ce qu’il est convenu
d’appeler la « science mystique
», c’est-à-dire à cette sagesse
déposée précisément dans les
enseignements de la Kabbale ?
Pourquoi alors faudrait-il les dissocier
? Pourquoi ne pourrionsnous
pas identifier l’intelligence
profonde du monde à son expression
la plus haute ?

S’il fallait effectivement apporter
une réponse à toutes ces
questions, il nous semblerait légitime
de distinguer entre ce qui
est dévoilé – c’est-à-dire écrit ou
enseigné – et ce qui ne l’est pas
encore et qui couve dans « l’ombilic
des limbes » (sic) : cette région
de la pensée qui n’est pas
encore advenue à la conscience.
Non pas parce ce que ce qui est
caché se tiendrait là comme cet
inconscient dont le siècle passé a
galvaudé et dilapidé la signification
authentique. Mais bien, parce
qu’à la manière des vagues qui
se déposent sur le rivage pour se
retirer aussitôt en laissant derrière
elles leur écume, la pensée
« mystique » – littéralement celle
qui se cache et qui reste encore
muette au régime de la rationalité
– exprime ce flux incessant
de l’enseignement traversant le
monde, l’informant et le chargeant
de sens, et qu’il convient
d’accueillir et d’identifier avant
d’espérer peut-être en récolter le
bouillonnement !

Car l’expression « Torat haNistar
» désigne à juste titre cette
intellection qui se joue dans la
dimension cachée de la subjectivité
connaissante et qui par
définition, n’est pas dévoilée. Et
l’on comprend pourquoi étudier
la Kabbale ne signifie pas encore
accéder au sens caché du monde.
Puisque, comme cela est rapporté
dans le Séfer Yétsira (chapitre
1, Michna 1) – où il est dit que
« D.ieu créa le monde avec trois
livres : le livre, le conteur, et l’histoire
» -, l’accès premier au « livre
» ouvert où se tient l’écriture
du monde est dans son essence
même distinct des outils nécessaires
à son dévoilement intelligent
(le « conteur »), et à plus
forte raison de son enseignement
effectif, son « histoire ».

En cette veille du 33è jour de
l’Omer, n’oublions donc pas ce
passage au verso de la 33è page
du Traité talmudique Chabbat
où il est raconté comment rabbi
Chimon bar Yo’haï s’enferma
dans une grotte douze années
puis douze mois, avant de sortir
à la lumière du monde pour y libérer
son enseignement malgré
les contraintes de l’exil…

Car c’est bien là, au plus profond
de l’identité « ramassée » sur ellemême
mais traversant cependant
la plénitude de l’être solaire et
lunaire, que débute l’accès intime
au sens qui rendra enfin possible
– rapidement et de nos jours ! – la
cohésion accomplie du réel et de
la vérité, c’est-à-dire le dévoilement
du « E’had » : l’universalité
authentique…

YEHUDA RÜCK


Avec l’accord exceptionnel d’Hamodia-Edition Française

Il est interdit de reproduire les textes publiés dans Chiourim.com sans l’accord préalable par écrit.
Si vous souhaitez vous abonner au journal Hamodia Edition Francaise ou publier vos annonces publicitaires, écrivez nous au :
fr@hamodia.co.il