AU REGARD de la Torah – c’està-
dire conformément à
cette Vérité absolue dont
nous parlons –, l’unique et véritable
but de l’homme dans cette vie
passagère est de faire connaître et
resplendir le Nom divin dans l’univers.
Par conséquent, plus on se
rapproche de ce but ultime – chaque
être humain, quel qu’il soit, en
fonction de ses dispositions et de
sa vocation personnelles –, plus on
s’élève dans la seule échelle de valeur
parfaitement authentique.
Or, en observant notre mode de
vie, nous nous apercevons que nos
échelles de valeur n’ont aucune
commune mesure avec cet ultime
but.
Ainsi, jaugeons-nous la valeur
d’un homme essentiellement selon
sa « réussite » – tout du moins suivant
l’acception que nous donnons
à ce terme. Un homme à la carrière
brillante, ayant amassé une fortune
colossale et donc considéré par
le gotha du grand monde comme
une « personnalité influente » sera
à nos yeux souvent digne de tous
les honneurs… En tous cas incomparablement
plus que ce simple
ouvrier qui consacre une partie
de sa journée à prodiguer le bien
autour de lui, à dominer ses mauvaises
pulsions et à dévoiler la
Volonté de son Créateur à travers
l’étude de la Torah.
En somme, le monde a tendance à
se refléter sur deux types d’échiquiers
: l’un terrestre et éphémère,
et le second céleste, absolu. Sur
l’échiquier divin, l’homme politique
le plus influent de la planète
peut n’avoir que le rôle d’un simple
« pion ». Le cas échéant, il pourra
être aisément sacrifié si l’un des
« soldats » d’un rang supérieur en
éprouve un jour le besoin…
Inversement, le plus humble érudit,
cloîtré entre les quatre murs de
sa maison d’étude, peut apparaître
dans la réalité de cette échelle de
valeur comme l’un des plus importants
éléments que toutes les autres
s’évertueront – sciemment ou non
– à protéger.
Guerre et paix !
Cette perspective – qui peut paraître
fort déroutante – se dégage
nettement de l’un des épisodes relaté
dans notre paracha. En cette
époque lointaine, quatre rois despotes
étendirent leur domination
sur toute la région située à l’Est
du Jourdain, assujettissant
notamment cinq
peuples et leurs cinq
rois établis dans la région
de la mer Morte.
Lorsque ces derniers
tentèrent de mettre un
terme à cette hégémonie,
toute cette contrée
s’embrasa et devint le
spectacle d’une impresionnante
invasion. Résultats
: ces quatre tyrans
dévastèrent dans
leur colère toutes les
contrées traversées sur
leur route et, arrivant
sur place, ils étouffèrent
violemment cette rébellion,
puis repartirent en
emportant corps et biens…
Mais pourquoi tous ces récits
de guerre apparaissent-ils dans
la Torah de manière aussi détaillée
?
Le Midrach Tan’houma (Lekh
Lékha, 8) apporte l’élément de réponse
suivant : « Ainsi a parlé le
Saint Béni soit-Il : Je suscite une
guerre entre ces rois afin qu’Avraham
puisse ensuite venir prendre
tous leurs biens ». Voilà comment
des événements géopolitiques
aux proportions phénoménales
peuvent ainsi être orchestrées
uniquement pour permettre ensuite
à notre premier patriarche,
le Juste le plus dévoué à la Cause
ultime du monde, d’en tirer profit.
Tous ces acteurs de l’Histoire
peuvent de la sorte se révéler être
de simples « pions » au service du
roi – à savoir Avraham…
Hachga’ha ‘pratite’
et ‘klalite’…
Dans le langage de nos Sages,
cette vision du monde est celle
qui permet de différencier entre
la hachga’ha pratite – à savoir : la
Providence « particulière » agissant
sur chaque individu – de la
hachga’ha klalite, qui concerne
quant à elle la « globalité » d’une
espèce. Des notions longuement
développées, entre autres, par le
Ram’hal (cité dans« Sifté ‘Haïm »
dans « Pirké Emouna véHachga’ha
»).
Autrement dit, deux formes d’Administration
divine orchestrent
le monde : sans tenir compte des
conjonctures extérieures, la première
considère l’individu de manière
distinctive, chacun voyant
sa vie orientée uniquement selon
ses « propres mérites » et son
« rôle personnel », et en fonction
de son efficacité à mener le monde
vers son but.
En revanche, la seconde hachga’ha
prend en considération
les êtres non comme des individus
particuliers, mais comme les
« membres d’une espèce ». Dans
ce mode d’Administration, la vie
de chaque être humain est orientée
en fonction de sa contribution
globale aux besoins de son « espèce
», c’est-à-dire à ceux de son
peuple et de son entourage.
En clair, un homme qui ne consacre
aucun temps ni énergie à rapprocher
le monde de son but n’a
pas le mérite de voir la hachga’ha
pratite lui accorder ce dont il a
besoin en propre : annulé à la
masse, il suit le mouvement global
des événements terrestres,
qui – quant à eux – sont dirigés
pour amener l’univers à son accomplissement.
Cette hachga’ha klalite fait que ces
individus ne sont considérés que
comme de simple pions – c’est-àdire
qu’ils ne remplissent qu’un
rôle annexe et secondaire. A l’opposé,
le Juste voit sa vie dirigée
par le Ciel de manière spécifique
et individuelle dans ses moindres
détails ! Et ce, dans la mesure où
il incarne une pièce maîtresse de
l’évolution du monde.
Voilà pourquoi il mérite pleinement
que toutes les autres « pièces
» – qui constituent la majorité
des développements humains
– évoluent suivant ses besoins
personnels afin de lui permettre
de mieux réaliser son objectif icibas.
YONATHAN BENDENNOUNE
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