Après la révolte du Cottage, il y a trois semaines, c'est au tour des loyers hors de prix à Tel-Aviv et dans les grandes villes d'être dans le collimateur des contribuables.

Tout a commencé il y a une dizaine de jours, lorsque Daphna Leef, une jeune Tel-avivienne de 25 ans a décidé de lancer un appel sur Facebook, dans lequel elle invitait tous ceux qui jugeaient trop élevé le montant de leur loyer à camper sur le boulevard Rothschild de Tel-Aviv. « Je ne vois aucune raison de continuer à consacrer la moitié de mon salaire à payer mon loyer, explique-t-elle. Et pourtant je suis seule, je travaille six jours sur sept et je n’y arrive pas ! Cette situation ne peut plus durer ! »
Répondant sans tarder à son appel, dès le vendredi 15 juillet, des dizaines de jeunes étudiants ou jeunes professionnels tel-aviviens ont déployé, sur les trottoirs centraux du boulevard Rothschild, presque autant de tentes. Lundi 18 juillet, on en recensait une centaine. Dans une ambiance bon enfant, les nouveaux squatters n’ont pas tardé à s’organiser : câbles électriques reliés aux immeubles voisins pour l’électricité nécessaire à l'éclairage, pique-niques improvisés – avec guitares, camping-gaz et Tupperware – la protestation réunit surtout des jeunes couples, souvent accompagnés d’enfants. Le théâtre Habimah, tout proche, a mis ses toilettes à leur disposition. Cette animation inattendue attire de nombreux curieux, dont les étudiants d’une yéchiva, venus organiser des prières pour Chabbat. Plutôt sceptiques, certains passants font remarquer qu’« ils veulent tous habiter Tel-Aviv. Ils n’ont qu’à aller s’installer ailleurs ». Un argument qui a été d'ailleurs repris à plusieurs reprises par des éditorialistes et surtout par le ministre du Logement, Ariel Attias (Shas) : « C'est la rareté des terrains qui explique le prix élevé des appartements au cœur de Tel-Aviv. Mais ces jeunes qui protestent ne sont malheureusement pas prêts à quitter Tel-Aviv pour la périphérie où le prix des loyers est bien plus accessible. C'est ainsi partout dans le monde, que ce soit à Manhattan ou à Londres », a déclaré Ariel Attias. Plusieurs éditorialistes ont admis que l'on ne pouvait pas comparer le combat des contribuables israéliens contre le Cottage et cette nouvelle campagne de protestation contre les prix des logements et des locations à Tel-Aviv. Ben Caspit, le correspondant politique du Maariv, a déploré que « ce mouvement donne l'impression d'être mené par des gauchisants de la bulle tel-avivienne ».
Naturellement, les politiques n’ont pas tardé à affluer pour manifester leur « soutien » et leur « compréhension ». Revenant sur sa décision d’interdire la manifestation, le maire de Tel-Aviv Ron Huldaï, a déclaré sur Facebook qu’elle était « appropriée et justifiée ». Selon lui, « la responsabilité de la situation en revient au gouvernement et à son absence de politique en matière de logement ». Le député Dov Hanin ('Hadach) a déploré que « l’on continue à construire des tours pour les millionnaires. 160 000 permis de construire ont été délivrés, mais les promoteurs attendent que les prix montent pour commencer les travaux ».
En milieu de semaine, la contestation s'est considérablement développée et elle s'est surtout « popularisée ». Des campements se sont formés d'abord à Béer-Chéva puis dans les villes de développement que sont Sdérot et Kiryat Chmona. Le mouvement a également touché les grandes villes de Kfar Saba et de Ramat Gan. Et cet engouement a alors conduit à un durcissement des prises de position. Ainsi le ministre de l'Intérieur Élie Ichaï a décidé de « surfer » politiquement sur cette vague sociale : « Si une solution n'est pas rapidement trouvée à la crise du logement, nous ne resterons pas dans la coalition ». Au sein même du Likoud cette protestation provoque un certain malaise. Pour le député Shama-Hacohen (Likoud), qui préside la commission économique de la Knesset, « soit les prix des loyers baissent, soit le gouvernement tombera ».
Le Premier ministre n'est pas resté insensible à ces menaces plus ou moins voilées. Au cours d'une réunion du groupe parlementaire Likoud, Binyamin Nétanyaou a promis des « surprises » : « Nous allons procéder à une législation éclair pour résoudre la crise du logement. Nous travaillons sur plusieurs solutions ». Le Premier ministre a ainsi révélé qu'il allait alléger les impositions sur les appartements afin de permettre à des milliers de personnes qui possèdent des unités de logements de les mettre en vente sur le marché.Par David Jortner,en partenariat avec Hamodia.fr