A deux jours du retrait des britanniques de Palestine, les USA n'avaient pas encore décidé si ils allaient ou non reconnaître l'Etat juif. Les lobbys antisionistes et sionistes s'étaient démenés et les pro-israéliens ne pouvaient compter que sur leurs prières, pour influer sur la volonté du Président Truman.


La plupart d'entre nous ignorent que la décision s'est jouée in extremis, Truman ayant finalement basculé en faveur de la reconnaissance d'Israël, suite à de nombreux facteurs (dont l'oublié et infatigable supporter d'Israël, Clark Clifford) dont l'histoire vaut la peine d'être racontée, tant elle illustre comment D. agit par petites touches et de manière cachée dans l'histoire des hommes…
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Truman et ses amis Juifs : la main de D.ieu
          Truman était un baptiste élevé dans le Missouri profond, ce qui ne le prédisposait pas à rentrer en empathie avec les malheurs des juifs, que la Shoah avait ravivés et que la création d'Israël pouvait atténuer. De plus sa femme Bess était antisémite, au point d'avoir interdit toute visite de juif dans leur domicile.
    – La main divine avait installé comme voisins dans le village d'enfance de Truman une famille juive, les Viners, qu'il allait fréquenter jusqu'à devenir leur « Shabbos Goy ». L'enfant studieux et religieux qu'il était en garda une admiration pour la destinée juive, à laquelle ses remarques sur certains côtés désagréables des juifs sont loin de faire de l'ombre. Cette vision du peuple juif sur le long terme, l'aura amené à concevoir sa destinée comme celle d'un Cyrus qui devait le ramener sur ses terres.
    – Une deuxième intervention divine met sous ses ordres en 14-18, le soldat juif Eddie Jacobson, avec qui il ouvrira un commerce au Kansas, avant une faillite qui le conduit vers l'administration. L'amitié entre les deux hommes restera solide, en dépit du temps qui passe et de leur écart de statut social. Lorsque les lobbyistes pro israéliens comme le Bnai Brith ou Weitzmann trouveront des portes closes à la Maison Blanche, c'est Jacobson, fort de cette amitié et de sa connaissance de Truman qui saura trouver les arguments pour que le Président accepte de les recevoir, première étape à sa conversion à leur cause.

   – Weitzmann, infatigable lobbyiste, voyage et ne se laisse rebuter par l'hostilité d'aucune cible, s'obstinant à positiver et à rester courtois pour convaincre. Ainsi après plusieurs refus, Truman (avec Weitzmann en photo) accepte à contrecoeur de le recevoir. Il lui démontre la nécessité d'une patrie pour les juifs et le convainc d'en définir des contours viables, qui incluent le Neguev (pour contrer les préconisations de certains conseillers de Truman mal intentionnés). Cela n'empêchera pas l'ambassadeur des USA à l'ONU, de tenter un passage en force en affichant dans les médias une position contraire aux promesses de Truman à Weitzmann. C'est alors la seule fidélité présidentielle à cette promesse qui poussera Truman à avoir le courage de le démentir publiquement.
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Pro et Anti Sionistes
          Les lobbyistes anti sionistes sont nombreux et comptent parmi eux le Foreign Office et la Défense. Le héros George Marshall, dont les positions, à la veille des élections, sont essentielles, en fait partie. Leurs arguments sont convaincants :
   -) L'Etat juif entouré d'ennemis ne saurait être viable sans des centaines de milliers de soldats américains, qu'une Amérique lassée des guerres, ne souhaite pas fournir.
   -) Le soutien à Israël conduirait à une hostilité arabe et un risque d'embargo en pétrole.
Face à eux, c'est surtout Clark Clifford (1907-1998), conseiller de nombreux Présidents démocrates et, quelques temps Ministre de la Défense, qui va faire pencher la balance, par la force de sa conviction et l'intelligence de la situation. Il est, avec Marshall, l'un des deux principaux conseillers du Président, chrétien évangéliste, quant à lui et convaincu de l'importance d'Israël pour l'humanité. Il raconte dans « Le long chemin » de Wiesenthal ce dernier débat entre les trois hommes et à deux jours de la décision.
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Les arguments convaincants de Clark Clifford

Chacun y assène ses arguments pour convaincre Truman, encore indécis. Il veut faire partager sa vision des camps et sa certitude que la solution au problème juif inclut la création d'un Etat juif. Il défend l'idée qu'en cédant devant des pays arabes faibles, l'on montre une Amérique affaiblie. Le sort de centaines de milliers de rescapés juifs en attente dans des camps de transit ne saurait dépendre du bon vouloir de quelques émirs.
Il veut aussi créer une démocratie dans un Moyen-Orient déstabilisé par des régimes autocratiques. Jamais il n'insiste sur l'importance de l'électorat juif dans l'investiture démocrate, contrairement à l'analyse de quelques historiens.
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Le Choix Personnel de Truman
Truman (avec Ben Gourion en photo) décide personnellement, dans l'affaire qui sera pour lui «la plus difficile comme Président». Comme il l'écrit à son frère, juste avant d'annoncer la position US : « ces fonctionnaires en costard voulaient que je foute les juifs dans le même panier que les autres races qu'ils détestent en me poussant contre la Palestine juive. Je vais maintenant faire ce que je pense être juste et les envoyer tous au diable ! ».
C'est ainsi seulement 11 minutes après la déclaration de création d'Israël que Truman annonce que les USA reconnaissent ce nouvel Etat et, à leur suite, nombre de leurs alliés !