En y regardant d’un peu plus près, on pourra s’apercevoir qu’une différence notable apparaît dans ce texte entre la version généralement admise et celle figurant dans certains anciens sidourim ashkénazes. La simple lecture de cette dernière version apparaît d’ailleurs tout simplement incompréhensible puisque l’on peut y lire : « Qui n’a pas établi notre sort comme le leur [les nations du monde], et notre lot comme celui de leur multitude. Car eux se prosternent, et nous nous prosternons devant le Roi des rois, le Saint béni soit-Il ».
L’incohérence de ce texte ne laisse nulle place au doute : ici aussi, la terrible censure chrétienne a marqué son passage en opérant de véritables coupures et « incisions ». Pour preuve, contraints de supprimer une phrase entière de cette prière, les éditeurs prirent néanmoins soin de laisser – quand ils en avaient la possibilité… – un espace bien net au beau milieu du texte pour porter témoignage des mots méritant d’être ajoutés à ce même emplacement !
Il ne fait néanmoins aucun doute que dans la version originelle du texte, ces quelques mots supplémentaires figuraient : « Eux se prosternent à des vanités et des inanités, et prient des dieux qui ne les délivrent pas, alors que nous nous prosternons devant le Roi des rois », comme tout le monde le sait aujourd’hui.
Mais contrairement à la plupart des rectifications arbitraires opérées par la Censure, il semblerait qu’à cet endroit, elle ne se méprit pas puisque ces « vanités et inanités » désignent effectivement les cultes célébrés par les nations qui nous entourent…
« Hével vaRik »
Dans le « KolBo » – un très important ouvrage de Lois sur le cycle de l’année juive datant de l’époque médiévale et dont l’identité de l’auteur n’est pas attestée –, apparaît une trop succincte explication de cette prière : « Des inanités » est d’une valeur numérique de « des dieux qui ne » sont d’une valeur de ». Ici aussi, les phrases furent manifestement coupées net et il ne fait aucun doute que les inquisiteurs de la Censure « révisèrent » également cet ouvrage pour empêcher le peuple juif d’exprimer son point de vue sur ces questions fort sensibles…
Mais en dépit de l’acharnement des censeurs, la tradition s’est perpétuée et ce ne fut jamais un secret pour quiconque de savoir exactement à quoi ces mots font référence ! Ce que nous traduisons par « inanités » est le mot « vaRik », dont la somme numérique est de 316… qui est également celle de « Yéchou », le messie chrétien… Et les mots suivants « Léel lo » – dont la valeur est de 92 – correspondent au nom du prophète de l’Islam, Mahomet, ou plus exactement Mou’hamad.
Ainsi, sans nulle connotation péjorative, le peuple d’Israël rend grâce à D.ieu par cette prière de l’avoir distingué des nations du monde qui honorent et vénèrent des dieux inexistants. Mais aux yeux des autorités ecclésiastiques de l’époque, la « liberté d’expression » était un privilège inconcevable et le droit légitime à la critique religieuse une inadmissible aberration…
Tant et si bien que suite à une dénonciation, l’empereur Frédéric I de Prusse décréta en 1703 que cette phrase soit effacée de tous les livres de prières juifs à l’intérieur de la prière de Alénou léChabéa’h. C’est ainsi que jusqu’à nos jours, celle-ci est encore absente dans certaines éditions de sidourim, tandis que dans beaucoup d’autres, elle apparaît toujours entre parenthèses, laissant faussement croire qu’il s’agirait d’une seconde version non confirmée… Et d’aucuns soutiennent que si la coutume se répandit de prononcer cette prière distinctement et à voix haute, c’était précisément pour apaiser les espions que l’empereur déléguait dans les synagogues afin de s’assurer que son ordre était bien respecté !
Mais composée – selon la tradition – par Yehochoua bin Noun, disciple de Moché, cette prière confirma sa supériorité sur les décrets du monarque puisque jusqu’à aujourd’hui, elle continue d’être fièrement prononcée trois fois par jour par le peuple juif qui lui a déjà rendu l’intégralité de son contenu…
Y. BENDENNOUNE
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