Les commémorations sont une véritable épreuve pour les ex-otages, mais Noémie, jeune infirmière de 28 ans et Carole, 40 ans et mère de trois enfants, ont décidé d'y assister malgré tout. Un pas en avant pour surmonter les angoisses, remontées en meute après les attentats du 13 novembre.
Actualité Juive : Douze mois se sont écoulés depuis les attentats, comment les avez-vous traversés ?
Noémie : Avant le 13 novembre, j'ai connu beaucoup de progrès et d'améliorations : je reprenais les transports en commun toute seule, j'arrivais à aller faire les magasins dans Paris, j'ai même réussi à partir en vacances. Beaucoup de choses positives avaient pu être accomplies. D'ailleurs je me suis fiancée, il y a quelques mois, et je me marie au mois de juin. Mais depuis les attentats de Paris le 13 novembre, c'est comme s'il y avait eu un retour à cette journée terrible de janvier.
Carole : Comment vous dire ? C'est justifié, bien évidemment on s'attendait à cet « anniversaire », mais depuis un an on essaye un peu d'oublier, de prendre ses distances pour se reconstruire, et les commémorations font que l'on se replonge complètement dans cette journée qui s'est passée il y a un an.
A.J.: Êtes-vous restée en contact avec les autres otages cachés avec vous dans la chambre froide le 9 janvier dernier ?
N. : On s'appelle très régulièrement, on se voit de temps en temps. Nous sommes très contents de ne pas avoir perdu le contact. Nous étions six dans ce sous-sol plus un bébé. Avec eux je parle un peu de tout, mais le sujet principal reste les attentats. En ce moment c'est pour tout le monde difficile, d'autant plus avec les derniers attentats de Paris.
C. : Nous sommes restés très liés, nous nous soutenons les uns les autres. On traverse exactement les mêmes étapes, phases d'angoisses, peurs, les mêmes montées, les mêmes descentes, et au même moment ! C'est assez étrange. On s'appelle aussi pour annoncer de bonnes nouvelles, les belles choses, mais surtout quand on a besoin de parler.
A.J.: Quel est votre sentiment après ces attentats justement ?
N. : Je pense que c'était à prévoir, mais je suis très surprise par l'ampleur de ces nouveaux attentats. Je pense qu'au niveau sécuritaire, il y a beaucoup de choses à améliorer. Aujourd'hui, et c'est un peu une condition pour moi pour sortir, je vérifie que tout est bien sécurisé dans les lieux où je dois me rendre. Mais je me rends compte que les agents de sécurité qui sont postés devant les magasins ou d'autres endroits ne font que des vérifications superficielles. Je trouve qu'après les événements récents c'est assez léger.
A.J.: Plusieurs procédures sont en cours, pouvez-vous nous en dire plus ?
N. : En ce moment est toujours instruite la plainte civile contre les auteurs des attentats de l'Hyper Cacher. En ce qui me concerne, ainsi que les autres personnes qui étaient présentes avec moi dans la chambre froide, nous avons déposé une plainte contre BFM TV pour l'information qu'ils avaient diffusée en direct expliquant qu'il y avait encore des personnes cachées au sous-sol : c'était nous.
C. : L'affaire BFM a été terrible pour moi. Quand nous étions cachés dans la chambre froide, j'étais en contact avec mon mari qui m'a expliqué que BFM venait de dévoiler que nous étions cachés en bas. Et là il y a plein de choses terribles qui me sont passées par la tête. Cela m'a réellement traumatisée. Il n'y a pas un jour où je me lève le matin sans dire merci à D.ieu, il n'y a pas un jour où je ne pense pas aux quatre qui sont partis. Tous les matins, je remercie le bon D.ieu d'être là vivante auprès des miens.
Pierre Assouline de Actualité Juive